Pourquoi Trump a-t-il retourné sa veste vis-à-vis de Zelensky ?

Entrevue 1

Donald Trump, le président américain, a intensifié ses attaques contre Volodymyr Zelensky, le président ukrainien, l’accusant de traiter avec « impolitesse » Scott Pient, le secrétaire au Trésor américain, qui s’était rendu à Kiev la semaine dernière pour discuter d’un accès aux ressources en métaux rares en échange de soutien sécuritaire.

Trump a expliqué lors d’un vol présidentiel de Miami à la Maison Blanche que Zelensky « dormait et n’était pas disponible pour rencontrer le secrétaire au Trésor ». Il a précisé : « Scott Pient est allé là-bas et a été maltraité, puisqu’on lui a essentiellement dit non. Zelensky était endormi et non disponible pour une rencontre. » Trump a ajouté : « Pient a voyagé plusieurs heures en train, un voyage risqué, dans le but d’obtenir un document signé, mais en revenant, il est rentré les mains vides, aucun document n’a été signé. »

Ces propos ont suivi ceux de Trump, qui avait qualifié Zelensky de « dictateur » refusant d’organiser des élections et averti qu’il devait agir vite « sinon son pays ne le soutiendrait pas ». Sur sa plateforme Truth Social, Trump a écrit : « Réfléchissez-y, il a convaincu un humoriste moyennement célèbre de dépenser 350 milliards de dollars pour une guerre que nous ne pouvons pas gagner », ajoutant : « Les États-Unis ont dépensé 200 milliards de dollars de plus que l’Europe. Pourquoi Biden n’a-t-il pas exigé l’équité, puisque cette guerre est plus importante pour l’Europe que pour nous ? » Trump a aussi accusé Zelensky de gaspiller la moitié des fonds envoyés, de refuser les élections et de manipuler Biden.

Les propos se sont intensifiés en moqueries, particulièrement lors du discours prononcé par Trump à Miami lors d’une conférence d’investissement parrainée par le fonds souverain saoudien, où il a qualifié Zelensky de « dictateur » voulant prolonger la guerre pour maintenir les aides financières, faisant référence aux aides militaires américaines.

Trump a ajouté : « J’aime l’Ukraine, mais Zelensky a fait un travail déplorable. Son pays est ruiné et des millions de vies ont été perdues sans raison. » Il a ajouté : « Si l’administration Biden avait eu une année de plus, la troisième guerre mondiale aurait eu lieu. Mais cela n’arrivera pas maintenant, car nous négocions activement pour mettre fin à la guerre avec la Russie, et tout le monde reconnaît que personne d’autre que Trump ne pourrait y parvenir, et je crois que Poutine en est conscient. »

Concernant la légitimité de Zelensky, les déclarations de Trump s’alignent sur la position russe, qui appelle à des élections en Ukraine, considérant Zelensky comme un leader « illégitime » et inapte à participer aux négociations de paix.

Les élections ukrainiennes étaient prévues pour mars 2024, mais ont été reportées en raison de la guerre. Selon la constitution ukrainienne, les élections ne peuvent se tenir en période de loi martiale, instaurée après l’invasion militaire de Moscou en février 2022.

Lors d’une déclaration précédente, Trump a suggéré que le désir d’adhérer à l’OTAN de l’Ukraine « avait été une cause majeure » de l’invasion russe et a ajouté que « l’Ukraine ne mérite pas de place à la table des négociations de paix », qu’il a entamées avec le président russe Vladimir Poutine. Il a aussi noté que les Russes souhaitent voir la guerre se terminer et ont pris un levier dans toute négociation.

Ces commentaires ont choqué les alliés européens des États-Unis et agacé le gouvernement ukrainien. Zelensky a réagi en disant que Trump « était tombé dans le piège de la désinformation russe », ajoutant que l’attaque de Trump contre lui venait directement de la Russie. Toutefois, avant sa rencontre avec Keith Kellogg, l’envoyé américain, il a adouci son ton en déclarant qu’il était important de travailler de manière constructive avec les États-Unis pour « renforcer la confiance ».

Le vice-président américain J.D. Vance a averti Zelensky de ne pas tenir de propos « insultants » envers Trump, sous peine de « conséquences négatives ». Vance a ajouté : « Ceux qui connaissent Trump vous diront que c’est une mauvaise façon de traiter cette administration. »

L’attaque de Trump contre Zelensky a réjoui Moscou, Dmitri Medvedev, l’ancien président russe, exprimant son soutien à Trump, qualifiant Zelensky de « clown en faillite ». Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a également soutenu Trump, affirmant qu’il était le seul dirigeant occidental à avoir clairement reconnu l’implication de l’administration précédente dans l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN.

L’attaque a suscité la colère des dirigeants européens. Le chancelier allemand Olaf Scholz a estimé qu’il était « erroné et dangereux de priver Zelensky de sa légitimité démocratique », tandis que le Premier ministre britannique Keir Starmer a exprimé son soutien à Zelensky, soulignant que la suspension des élections en temps de guerre était « tout à fait raisonnable ».

Les républicains ont défendu Trump, soulignant qu’il pourrait avoir « un excellent plan » pour mettre fin à la guerre. Le leader républicain au Sénat, John Thune, a déclaré qu’il soutenait une issue pacifique en Ukraine, estimant que Trump et son équipe œuvraient pour la paix.

Les démocrates ont, quant à eux, critiqué Trump pour son soutien à la Russie. Chuck Schumer, le leader de la minorité au Sénat, a jugé « répugnant » de voir un président américain se retourner contre un allié et s’allier publiquement à un tyran comme Vladimir Poutine.

Cet retournement de position marque un écart notable entre l’administration Trump et la politique de soutien à l’Ukraine suivie par l’administration Biden. La presse a rapporté que Trump a modifié la politique étrangère des États-Unis en seulement quatre semaines, affaiblissant leur position sur la scène mondiale.

Les tensions entre Trump et Zelensky remontent à un appel téléphonique du 25 juillet 2019, qui a conduit à une première tentative de mise en accusation de Trump, accusé de pression sur Zelensky pour obtenir des informations nuisibles sur Joe Biden avant l’élection de 2020.

Les experts restent divisés sur l’évolution de la guerre. Certains estiment que les négociations avec la Russie sont la meilleure option, tandis que d’autres craignent que Trump ne coupe l’aide à l’Ukraine, prolongeant ainsi le conflit.

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