La « loi Ménard » adoptée au Sénat : vers la fin des mariages de complaisance ?

Entrevue 1

Le Sénat a adopté cette semaine en première lecture la proposition de loi visant à interdire le mariage aux étrangers en situation irrégulière, un texte porté par le sénateur Stéphane Demilly et soutenu par Gérald Darmanin. Cette adoption intervient dans un contexte de forte médiatisation, notamment après l’affaire du maire de Béziers, Robert Ménard, poursuivi pour avoir respecter la loi en refusant de marier un homme sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Ce cas avait relancé le débat sur la responsabilité des maires et la nécessité d’une évolution législative pour leur donner plus de latitude face aux mariages suspects.

Si cette « loi Ménard » a provoqué des débats houleux au Palais du Luxembourg, son adoption marque un tournant dans la lutte contre les mariages de complaisance. À l’origine, le texte visait à interdire purement et simplement le mariage aux étrangers en situation irrégulière, mais le Sénat a introduit plusieurs amendements pour le rendre plus conforme à la Constitution. Désormais, il prévoit notamment l’obligation pour les futurs époux de fournir des justificatifs de séjour et renforce les pouvoirs des maires et des procureurs en cas de doute sur la sincérité d’une union.

Gérald Darmanin, aujourd’hui garde des Sceaux, a assumé pleinement cette réforme, appelant même le Conseil constitutionnel à réviser sa position. Selon lui, le mariage ne peut pas être un moyen de contourner les lois sur le séjour et l’accès aux droits qu’il confère doit être encadré. Il s’agit, selon le ministre, de protéger les maires et d’adapter la loi aux évolutions de la société, alors que les obligations de quitter le territoire français ont explosé ces dernières années.

L’Assemblée nationale devra maintenant se prononcer sur cette proposition de loi, qui pourrait y trouver une majorité favorable. Toutefois, la gauche a déjà annoncé qu’elle saisirait le Conseil constitutionnel, estimant que cette réforme porte atteinte à la liberté du mariage. Si les Sages confirment leur jurisprudence, l’interdiction stricte des mariages pour les sans-papiers pourrait être censurée, mais les nouvelles prérogatives accordées aux maires et aux procureurs pourraient, elles, être maintenues.

Quoi qu’il en soit, cette loi est une avancée pour les maires, qui se retrouvaient parfois pris au piège d’un cadre juridique contradictoire. Robert Ménard, dont le refus de marier un sans-papiers a déclenché ce débat, peut voir dans cette adoption une forme de reconnaissance : sa position, hier contestée, a ouvert la voie à un changement législatif qui pourrait redéfinir l’équilibre entre droit au mariage et respect des règles de séjour.

Avatar photo

Journaliste, chroniqueur et producteur, Radouan Kourak est un passionné d’histoire et de politique. Il se distingue par son goût pour l’analyse, le débat, le pluralisme et la confrontation d’idées. Repéré par Cyril Hanouna, il est un habitué des plateaux de C8 et CNews, où il intervient avec conviction et réflexion. Il apporte dans les médias, une perspective unique nourrie par sa passion pour la France et son souci de rigueur.

Thumbnail