Tensions autour du canal de Panama : Washington démenti par les autorités panaméennes

Entrevue 1

Le coup de force n’opère pas. Dans la nuit de mercredi à jeudi, le secrétaire d’État américain Marco Rubio a affirmé que les navires du gouvernement américain étaient désormais dispensés de payer les frais de navigation pour transiter par le canal de Panama. Cet accord permet à Washington d’économiser « des millions de dollars par an », s’est réjoui le ministre des Affaires étrangères américain.

Sauf que l’Autorité du canal de Panama a démenti dans la foulée. Cette autorité, une agence autonome supervisée par le gouvernement panaméen, a déclaré dans un communiqué qu’elle n’avait apporté aucun changement à sa facturation des frais ou des droits de traversée du canal, ajoutant que sa déclaration était une réponse directe aux affirmations américaines.

« En toute responsabilité, l’autorité du canal de Panama, comme elle l’a indiqué, est disposée à établir un dialogue avec les responsables américains concernés au sujet du transit des navires de guerre en provenance de ce pays », ajoute l’autorité du canal.

Le Panama est devenu un point focal de l’administration Trump juste avant Noël quand le président républicain a accusé l’Autorité de pratiquer des tarifs prohibitifs, sauf pour la Chine qui en aurait pris le contrôle. Il a menacé d’agir au besoin par la force pour reprendre l’un des passages commerciaux les plus fréquentés au monde.

Preuve de l’importance que Washington accorde à ce dossier : c’est au Panama que Marco Rubio a fait son premier déplacement à l’étranger. Dimanche, il a rencontré le président panaméen, qui lui a tenté de lui donner des gages sans trop céder. José Raul Mulino, s’il a réaffirmé que la souveraineté du Panama sur le canal n’était pas sujette à débat, a assuré que le protocole d’accord Belt and Road, conclu avec la Chine en 2017, ne serait pas renouvelé, voire, a-t-il laissé entendre, qu’il pourrait prendre fin plus tôt que prévu.

Le président Mulino a conseillé d’attendre les conclusions de l’audit qui a été lancé sur une entreprise liée à la Chine qui exploite deux terminaux autour du canal. « Nous devons attendre la fin de cet audit avant de pouvoir tirer nos conclusions juridiques et agir en conséquence », a-t-il dit. La Panama Ports Company, filiale du conglomérat hongkongais CK Hutchison Holdings, qui supervise une cinquantaine de ports dans le monde, est une entreprise de gestion des chargements et d’approvisionnement des navires. Trois autres ports à proximité du canal sont exploités par des entreprises concurrentes qui fournissent des services similaires.

Mulino a déclaré aux journalistes que le Panama chercherait à travailler avec les États-Unis sur de nouveaux investissements, notamment des projets d’infrastructures. « Je pense que cette visite ouvre la porte à la construction de nouvelles relations… et à une tentative d’augmenter autant que possible les investissements américains au Panama », a-t-il déclaré.

Insuffisant pour Trump, qui a aussitôt tonné. « La Chine gère le canal de Panama qui ne lui a pas été donné, qui a été donné au Panama de manière stupide, mais ils ont violé l’accord, et nous allons le reprendre, ou quelque chose de très puissant va se produire », a déclaré Trump aux journalistes.

Mercredi, le ministère chinois des Affaires étrangères a annoncé avoir déposé plainte auprès des États-Unis pour des propos « irresponsables » concernant le canal de Panama et des « attaques » contre la coopération de la Chine avec le Panama sur le canal. « Actuellement, la coopération entre la Chine et le Panama dans le cadre de l’initiative Belt and Road se déroule normalement », a déclaré le porte-parole du ministère.

Thumbnail