C’est un séisme dans le monde agricole. Avec une percée historique aux élections des chambres d’agriculture, la Coordination rurale (CR) signe une victoire éclatante et s’impose comme une alternative crédible face à l’alliance FNSEA-Jeunes Agriculteurs (JA), qui voit son emprise historique sérieusement ébranlée.
Le vent du changement souffle sur les campagnes
Les résultats, encore provisoires, marquent un tournant : la Coordination rurale a raflé une majorité des voix parmi les chefs d’exploitation dans une quinzaine de départements, notamment dans le Cher, les Ardennes, la Charente, l’Indre-et-Loire ou encore le Gers. Le syndicat des bonnets jaunes réalise une démonstration de force spectaculaire dans son bastion du Lot-et-Garonne, où il décroche près de 70 % des suffrages.
Un rejet massif de la cogestion menée depuis des décennies par la FNSEA ? La CR n’hésite pas à le dire haut et fort. « Les agriculteurs ont dit stop à la cogestion, responsable de la disparition d’un million de vaches et de 150 000 fermes en 10 ans », martèle le syndicat dans un communiqué. Ce scrutin marque une sanction claire contre une FNSEA qui, à force de compromis avec le pouvoir et de soumission à Bruxelles, a fini par trahir les intérêts des paysans.
Si l’alliance FNSEA-JA reste la première force syndicale du pays, elle subit un net recul. Avec moins de 50 % des suffrages – un seuil symbolique –, elle perd une quinzaine de chambres d’agriculture, bien au-delà des prévisions les plus pessimistes. Même en Gironde, où la CR l’emporte avec seulement six voix d’avance, l’effondrement est visible : la FNSEA-JA n’a plus que trois élus, contre douze pour la Coordination rurale, grâce au mode de scrutin.
Le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, tente de minimiser la débâcle. « Nos listes sont arrivées en tête dans plus de 80 % des départements », insiste-t-il, tout en concédant que « la colère s’est exprimée ». Ce qui est frappant, c’est la perte de terrain dans des territoires intermédiaires où les exploitants agricoles subissent de plein fouet les crises successives, abandonnés par un syndicalisme devenu un simple relais des bureaucrates parisiens et bruxellois.
Un mouvement populaire et enraciné
La Coordination rurale s’impose ainsi comme la seule alternative crédible pour les paysans qui refusent la disparition de leur métier sous les coups de boutoir de l’ultralibéralisme et des accords de libre-échange signés dans le dos du monde agricole. Dans le Sud-Ouest, où la viticulture souffre des importations sauvages et des décisions absurdes de l’UE, les paysans ont massivement basculé vers la CR. Même constat dans les zones d’élevage, étranglées par les normes environnementales absurdes et la concurrence déloyale du Mercosur.
Cette victoire est aussi celle d’un syndicalisme de terrain, qui refuse les compromissions et qui défend une vision enracinée de l’agriculture française. Comme l’explique Jérôme Bayle, tête de liste victorieuse en Haute-Garonne : « On veut casser le système. Il y a une fracture entre le terrain et le syndicalisme. » Un cri du cœur qui résonne chez des milliers d’agriculteurs, lassés d’être les oubliés d’un pays qui ne jure plus que par les technocrates et les multinationales.
La FNSEA et ses alliés à la peine
Face à cette montée en puissance, la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs apparaissent dépassés. « On ne bâtit rien sur la colère », s’est contenté de déclarer le président des JA, Pierrick Horel, comme pour tenter de discréditer ce vote de révolte. Mais la réalité est bien plus profonde : ce scrutin traduit une rupture avec un syndicalisme d’appareil, qui n’a cessé de trahir les agriculteurs en validant des politiques agricoles suicidaires.
Dans l’Indre-et-Loire, département où est née la Coordination rurale en 1991, la FNSEA est balayée avec seulement 32 voix d’écart. En Lozère et en Charente-Maritime, d’autres bastions cèdent sous la pression d’un électorat agricole qui ne veut plus être sacrifié sur l’autel du mondialisme.
Au-delà des résultats bruts, ces élections sont un signal fort envoyé au pouvoir. La colère des agriculteurs, qui s’est exprimée à travers les blocages et manifestations des derniers mois, s’est désormais traduite dans les urnes. La FNSEA paie le prix de son alignement sur les décisions gouvernementales et européennes, tandis que la CR récolte les fruits d’une posture combative et fidèle aux intérêts des paysans français.
Avec désormais 14 chambres d’agriculture sous son pavillon, la Coordination rurale ancre son influence et s’installe durablement comme une force incontournable du paysage syndical agricole. Un premier pas vers la reconquête d’une agriculture française libre et souveraine ? C’est en tout cas l’espoir que portent les milliers d’agriculteurs qui, en votant CR, ont envoyé un message clair : ils ne veulent plus être les oubliés de la nation.