« Bigorexie » : quel est ce trouble de plus en plus présent chez les jeunes hommes ?

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Si l’exercice physique est essentiel pour maintenir une bonne santé, lorsqu’il devient excessif et compulsif, il peut révéler un trouble psychologique de plus en plus répandu : la bigorexie. Ce trouble, également appelé dysmorphie musculaire, touche principalement les hommes et est reconnu comme une maladie mentale par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) depuis 2011. Alors qu’une pratique modérée du sport est bénéfique, lorsque celle-ci devient un objectif dévorant lié à une image corporelle déformée, elle peut nuire à la santé physique et mentale.

La bigorexie est souvent caractérisée par une obsession excessive de la taille des muscles et de l’apparence physique. Les individus touchés par ce trouble ont une vision altérée de leur corps, qu’ils considèrent comme insuffisamment musclé, même s’il l’est déjà. Ce phénomène touche de plus en plus de jeunes hommes, notamment les adolescents, et trouve en grande partie son origine dans la pression sociale et les standards de beauté véhiculés par les réseaux sociaux.

La société actuelle place une pression de plus en plus grande sur l’image corporelle. Les réseaux sociaux, en particulier, sont un terrain fertile pour le développement de la bigorexie. Influencés par les images idéalisées des influenceurs et des célébrités, les jeunes hommes sont constamment exposés à des modèles physiques jugés « parfaits » et qui semblent inaccessibles. Ces images sont souvent retouchées ou filtrées, donnant une vision fausse et déformée de la réalité. Pourtant, ces jeunes, souvent vulnérables et en quête d’approbation, n’ont pas toujours conscience de ces manipulations.

Une étude menée en 2019 par l’Université de San Francisco a révélé que 22% des jeunes hommes américains présentaient des comportements alimentaires désordonnés axés sur la musculature. Une autre étude menée en 2022 à l’Université de Toronto confirme que les troubles liés à la dysmorphie musculaire concernent principalement les hommes, en particulier ceux qui cherchent à atteindre une silhouette mettant en avant à la fois la masse musculaire et la minceur.

Les raisons qui expliquent la montée de la bigorexie sont diverses. En plus des facteurs sociaux, des éléments biologiques et psychologiques viennent renforcer ce trouble. Selon Kara Becker, thérapeute interrogée par le HuffPost, des antécédents familiaux de troubles de l’image corporelle ou d’anxiété, une faible estime de soi ou encore une tendance au perfectionnisme augmentent le risque de développer cette obsession.

Les conséquences de la bigorexie ne sont pas à sous-estimer. En plus de l’impact sur la santé mentale, cette obsession peut mener à l’usage de substances dangereuses. Les personnes atteintes de dysmorphie musculaire recourent souvent à des stéroïdes anabolisants et à des suppléments alimentaires pour augmenter leur masse musculaire ou perdre de la graisse. Ces produits peuvent avoir des effets dévastateurs sur la santé physique, allant des troubles hormonaux à des risques cardiovasculaires.

Face à cette situation, les experts insistent sur l’importance de soutenir les jeunes hommes confrontés à la bigorexie. Jason Nagata, pédiatre spécialisé dans les troubles alimentaires chez les hommes, souligne que ces troubles sont souvent sous-diagnostiqués. Il recommande aux parents de créer un environnement propice aux discussions ouvertes sur l’image corporelle et de promouvoir une attitude saine envers le corps et l’estime de soi.

Les parents et les proches jouent un rôle clé en aidant leurs enfants à surmonter ce trouble. En étant des modèles de comportements positifs et en encourageant des conversations sincères et bienveillantes, ils peuvent contribuer à réduire les pressions sociales qui alimentent cette obsession.

La bigorexie, bien que souvent invisible à l’œil nu, est un trouble grave qui mérite toute notre attention. Il est crucial de sensibiliser la société aux dangers de la quête excessive de la perfection physique et de rappeler que la santé mentale doit toujours primer sur l’apparence extérieure.

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