Les récentes annonces présidentielles en matière de commerce ont suscité des inquiétudes parmi les constructeurs automobiles américains depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche le mois dernier.
Bien que certaines mesures, comme l’instauration de droits de douane de 25 % sur le Mexique et le Canada, aient été évoquées avant d’être suspendues, l’approche offensive de Trump envers le commerce international exerce une pression croissante sur les coûts, selon des experts du secteur.
Une taxe supplémentaire de 10 % a été appliquée aux importations chinoises, un fournisseur clé de pièces automobiles. Par ailleurs, une augmentation de 25 % des droits sur l’acier et l’aluminium, prévue pour le 12 mars, risque d’impacter considérablement les coûts de production et d’approvisionnement.
Le PDG de Ford, Jim Farley, a souligné cette semaine que « l’accumulation progressive de taxes ici et là finira par avoir un impact important. »
Aucune baisse d’intensité n’a été constatée dans la mise en place de nouvelles réglementations commerciales par la présidence.
En signant jeudi un projet visant à instaurer des « droits de douane réciproques » avec certains partenaires, Trump a mis en avant l’écart entre les taxes américaines et européennes sur les importations de véhicules, citant cet exemple comme une illustration des ajustements qu’il souhaite opérer.
Le lendemain, le président a annoncé qu’il présenterait de nouveaux tarifs douaniers sur les voitures étrangères début avril, sans préciser immédiatement les montants ni les pays concernés.
Si ces taxes, actuellement suspendues, devaient finalement être imposées au Mexique et au Canada, elles entraîneraient « une rupture » dans l’industrie automobile américaine, qui est étroitement liée à ces deux pays depuis l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) des années 1990, selon Farley.
Charlie Chesbrough, économiste chez Cox Automotive, estime que « le risque est bien identifié, mais il est peu probable qu’il provoque une crise majeure. »
Outre les grands constructeurs de Detroit, plusieurs groupes automobiles internationaux ont également des investissements considérables au Mexique et au Canada. Honda, par exemple, possède des usines dans ces trois pays et, d’après les données de Global Data, aucune des voitures qu’elle a commercialisées aux États-Unis en 2024 n’a été importée du Japon.
De nouveaux investissements aux États-Unis
L’administration Trump considère les taxes douanières comme un levier à la fois financier et stratégique, incitant les entreprises à accroître leur production sur le territoire américain.
Trump a fait des droits de douane un pilier de sa politique « America First », estimant qu’ils permettent de rééquilibrer les relations commerciales jugées inéquitables avec certains partenaires.
Un rapport publié jeudi par la Maison-Blanche souligne que l’Union européenne applique une taxe de 10 % sur les véhicules importés, alors que les États-Unis n’imposent que 2,5 %.
En Europe, l’Allemagne est le principal exportateur de voitures vers les États-Unis, avec des marques prestigieuses comme BMW, Mercedes-Benz et Audi, qui possèdent également des sites de production sur le sol américain.
Jeff Schuster, vice-président de la recherche mondiale chez Global Data, estime que Bruxelles pourrait accepter sans grande difficulté les ajustements demandés par Washington en matière de droits de douane sur les automobiles.
Il explique que « les véhicules américains, en particulier ceux qui ont du succès aux États-Unis, ne rencontrent pas le même engouement en Europe », ce qui limiterait l’impact de ces changements.
Selon plusieurs experts du secteur, des constructeurs étrangers pourraient annoncer prochainement des projets d’extension ou de nouvelles usines aux États-Unis. Cependant, ils restent confrontés à l’incertitude concernant les modèles à produire, en raison de l’évolution des priorités politiques américaines.
Alors que l’administration Trump modifie les règles du commerce international, elle semble également vouloir réduire les initiatives en faveur des véhicules électriques, ce qui place les États-Unis en opposition avec l’Europe, la Chine et d’autres grands marchés mondiaux.
Les délais de production dans le secteur étant longs, les véhicules issus des décisions prises aujourd’hui ne seront commercialisés que dans quatre ou cinq ans.
Schuster conclut : « Pour des entreprises opérant à l’échelle mondiale, il est difficilement viable d’adopter des stratégies différentes sur chaque marché. »