Jusqu’au 27 juillet 2025, le musée d’Orsay propose une exposition inédite consacrée à Christian Krohg, figure majeure de la scène artistique norvégienne du XIXe siècle. Jamais encore son œuvre n’avait été présentée en dehors de la Scandinavie à une telle échelle. Avec cette rétrospective intitulée Le Peuple du Nord, le public français découvre un artiste à la fois peintre, écrivain et journaliste, pour qui l’art se devait d’être engagé, sensible et accessible à tous. Son style audacieux, influencé par Courbet, Manet ou Caillebotte, se distingue notamment par des cadrages novateurs et une quête d’immédiateté visuelle.
L’exposition retrace le parcours d’un homme profondément ému par la condition humaine. Du quotidien rude des pêcheurs de Skagen aux portraits intimistes de sa famille, en passant par ses œuvres manifestes sur la prostitution et la misère sociale, Krohg aborde sans détour les réalités de son temps. Son roman Albertine, interdit dès sa publication pour « atteinte aux bonnes mœurs », fut suivi d’un tableau éponyme tout aussi provocateur, dénonçant les violences subies par les femmes pauvres. L’artiste n’hésitait pas à choquer pour éveiller les consciences, défendant une peinture capable de « scandaliser, toucher ou séduire », selon ses propres mots.
Membre actif de la Bohème de Kristiania, il côtoya les cercles progressistes et les grands penseurs scandinaves comme Georg Brandes ou Henrik Ibsen. À travers ses portraits de marins, d’intellectuels ou de mères en train d’allaiter, il façonne une galerie d’êtres vivants, enracinés dans leur époque, fragiles mais dignes. Loin des canons académiques, son œuvre impose un regard empathique et profondément moderne, que cette exposition ambitieuse et nécessaire permet enfin d’embrasser dans toute sa richesse.