Les récentes informations concernant la suspension, par le Fonds d’investissements publics, de la collaboration avec la société de conseil « PwC » pendant un an soulignent les défis auxquels le secteur du conseil est confronté en Arabie Saoudite. Cela est particulièrement lié à l’implication des sociétés de conseil dans les grands projets du Royaume, l’attraction des investissements pour les initiatives de transformation numérique, et surtout leur rôle clé dans la réalisation d’un objectif majeur de la « Vision 2030 » : la localisation des talents locaux et l’augmentation de leur présence sur le marché du travail.
Ces dernières années, le secteur du conseil a connu une croissance importante dans la région du Golfe, stimulée par les initiatives visant à diversifier l’économie au-delà du pétrole. Cette évolution a conduit à une demande accrue de services de conseil pour soutenir l’émergence de nouveaux secteurs dans le cadre de la diversification économique. En Arabie Saoudite, ce processus a été renforcé par une vision ambitieuse, accompagnée de programmes stratégiques et de projets nécessitant des conseils spécialisés dans de nombreux domaines, tels que la planification stratégique, la gestion de grands projets, la transformation numérique, et l’accompagnement des institutions dans l’adoption de nouvelles technologies et le développement des compétences numériques locales. Ces besoins ont fait augmenter la demande pour les entreprises de conseil, dont le nombre a fortement augmenté, contribuant à l’expansion du marché, qui a atteint 3,2 milliards de dollars en 2023, selon « Consultancy Quest ».
Pendant des décennies, les grandes sociétés mondiales comme « PwC », « Ernst & Young », « Deloitte », « KPMG », ainsi que des cabinets comme « McKinsey » et « Booz Allen », ont dominé le secteur du conseil.
Cependant, fin février, « Bloomberg » a rapporté que le fonds souverain saoudien avait suspendu temporairement « PwC » de l’attribution de nouveaux contrats de conseil, et que cette interdiction durerait jusqu’en 2026. « Reuters » a précisé que le Fonds d’investissement public et le Royaume sont des clients majeurs de « PwC », avec plus de 2 600 employés travaillant sur des projets dans le pays.
Cette information, qui n’a pas été confirmée ni détaillée, a provoqué de nombreuses discussions sur les réseaux sociaux, critiquant le « monopole » des entreprises de conseil mondiales, perçu comme un frein au développement des compétences locales et au transfert de connaissances, contribuant à la mise en place d’une base locale solide pour soutenir la croissance économique et sociale.
Le taux de localisation dans le secteur du conseil a été porté à 40 % par le ministère des Ressources humaines et du Développement social en mars 2024, contre 35 % auparavant. Ce changement résulte d’une décision prise en octobre 2022 pour accroître progressivement les exigences de localisation dans ce domaine.
Mohammed Al-Qahtani, directeur général de Saudi Investment Holding Company, a évoqué récemment sur LinkedIn l’absence d’implication des talents locaux dans les décisions stratégiques, soulignant un écart majeur dans le transfert de connaissances.
Les initiatives du gouvernement pour la localisation des talents se poursuivent, non seulement dans le secteur du conseil, mais à l’échelle nationale. Elles visent à augmenter la participation des citoyens, en particulier des jeunes, dans le marché du travail et à soutenir leur croissance économique. Ces efforts ont contribué à réduire le taux de chômage, qui est passé de 12,8 % en 2018 à 7,1 % en 2024, un chiffre proche de l’objectif de 7 % fixé dans la « Vision 2030 ».
Ali Al Eid, spécialiste des ressources humaines, a souligné l’importance des programmes de formation pour aider à combler le fossé entre les besoins des entreprises de conseil et les compétences des chercheurs d’opportunités. Selon lui, ces programmes sont essentiels pour soutenir la croissance du secteur du conseil, qui bénéficie également des initiatives liées à la « Vision 2030 ».
La question reste de savoir si les entreprises de conseil locales peuvent remplacer les multinationales. Le gouvernement a introduit plusieurs réformes réglementaires pour créer un environnement propice aux entreprises locales, incluant des programmes de transfert de connaissances et des partenariats public-privé. Une source ayant travaillé dans une société de conseil mondiale en Arabie Saoudite estime que la situation actuelle pourrait favoriser les entreprises locales, qui connaissent bien le marché et les réglementations locales, à condition qu’elles renforcent leurs capacités et établissent des partenariats stratégiques avec les multinationales.