L’intelligence artificielle redessine le monde enchanteur du studio Ghibli sans autorisation

L’intelligence artificielle redessine le monde enchanteur du studio Ghibli sans autorisation

Quelques jours après le lancement du dernier générateur d’images par intelligence artificielle d’OpenAI, des images créées par ChatGPT, imitant le style du studio japonais Ghibli, ont envahi les réseaux sociaux. Les utilisateurs ont transformé des photos de célébrités et leurs propres portraits en illustrations dans le style Ghibli avec des détails extrêmement précis, selon CNN.

Pour générer une image dans ce style, il suffit de télécharger une photo sur ChatGPT et d’écrire la commande : « Redessine cette image dans le style du studio Ghibli en conservant tous les détails » (Restyle image in studio Ghibli style keep all details). Le modèle analyse alors les images du studio Ghibli et convertit la photo en une illustration fidèle à l’esthétique emblématique du studio.

Bien que cette mise à jour ait produit des résultats impressionnants, elle a également soulevé des préoccupations éthiques quant à l’utilisation d’outils d’intelligence artificielle entraînés sur des œuvres protégées par le droit d’auteur, et sur les répercussions potentielles pour l’avenir des artistes.

Hayao Miyazaki et ses doutes sur l’IA

Hayao Miyazaki, cofondateur du studio Ghibli, âgé de 84 ans et connu pour son approche artisanale du dessin et ses récits enchanteurs, a exprimé son scepticisme quant à l’utilisation de l’intelligence artificielle dans l’animation.

Le déclencheur

Tout a commencé lorsqu’un utilisateur nommé Jano Lingeswaran a testé le générateur d’images de ChatGPT en transformant la photo de son chat dans le style Ghibli. Le résultat, saisissant de ressemblance avec les chats dessinés dans les films de Miyazaki, a rapidement captivé les internautes, les incitant à tenter l’expérience.

Le phénomène a même attiré l’attention du PDG d’OpenAI, Sam Altman, qui a participé à l’engouement en changeant sa photo de profil pour une version Ghibli de lui-même.

Face à l’afflux de demandes, Altman a réagi sur son compte en déclarant : « C’est génial de voir autant de gens s’amuser avec la génération d’images sur ChatGPT, mais cela surcharge nos GPU. Nous allons donc temporairement limiter le nombre d’images générées – en espérant que cela ne dure pas trop longtemps. Pour l’instant, les utilisateurs gratuits pourront créer jusqu’à trois images par jour. »

OpenAI a précisé dans un rapport technique que son outil adopte une approche plus prudente lorsqu’il imite les styles d’artistes encore en vie. Toutefois, l’entreprise admet qu’elle permet toujours à ses modèles de reproduire certains styles artistiques.

Un vol artistique ?

Alors que les images de style Ghibli proliféraient en ligne, les anciennes déclarations de Miyazaki à propos de l’IA ont refait surface. Une vidéo de 2016 le montre dénonçant l’intelligence artificielle comme une « insulte à la vie elle-même », affirmant qu’il ne voudrait jamais intégrer une telle technologie dans ses œuvres.

Il a raconté une histoire personnelle pour illustrer son rejet : « Chaque matin, je vois un ami dont le bras est si handicapé qu’il ne peut même pas me serrer la main. Quand je pense à lui, je ne peux pas considérer ces créations comme intéressantes. Ceux qui fabriquent ces choses ne comprennent pas la douleur. »

L’IA utilise les œuvres de Miyazaki sans permission

Josh Wegensberg, avocat chez Pryor Cashman, a soulevé la question de savoir si l’IA a été entraînée sur les œuvres de Miyazaki ou du studio Ghibli sans autorisation. Il se demande : « Ont-ils même une licence ou une autorisation pour cet entraînement ? »

Il a expliqué que si une entreprise concède une licence pour un tel usage, cela pourrait être acceptable, mais si ces modèles sont entraînés sans consentement ni compensation, cela pose problème.

En théorie, un style ne peut être protégé par le droit d’auteur, mais si l’on examine des œuvres précises comme Le Château ambulant ou Le Voyage de Chihiro et que l’on compare certains éléments visuels aux images générées par l’IA, les similitudes sont frappantes. Cela signifie que l’argument selon lequel le « style » n’est pas protégé pourrait ne pas suffire à clore le débat juridique.

L’artiste Carla Ortiz a dénoncé cet usage comme un exemple flagrant du manque de considération des entreprises comme OpenAI pour les créateurs et leur gagne-pain. « C’est une exploitation pure et simple du nom, de la marque et de la réputation de Ghibli pour promouvoir les produits d’OpenAI. C’est une insulte à l’art. »

Ortiz, qui a grandi en regardant les films de Miyazaki et a intenté un procès contre des générateurs d’images IA pour violation de droits d’auteur, a été encore plus outrée lorsqu’elle a vu l’administration Trump utiliser une image de style Ghibli sur le compte officiel de la Maison-Blanche pour illustrer une arrestation par l’immigration américaine.

Elle a réagi en écrivant : « C’est une honte de voir une œuvre aussi magnifique que celles de Miyazaki être déformée et exploitée pour produire quelque chose d’aussi corrompu. » Elle espère que le studio Ghibli intentera une action en justice contre OpenAI.

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