La France, deuxième exportateur d’armes mais en manque pour sa propre armée

La France, deuxième exportateur d’armes mais en manque pour sa propre armée

Des Rafale flambant neufs aux sous-marins high-tech, la France s’impose comme le deuxième exportateur d’armes au monde, derrière les indétrônables États-Unis. Pourtant, dans le même temps, l’armée française peine à se fournir en matériel et en munitions, un comble pour un pays qui brille sur le marché de l’armement. Une contradiction qui, en réalité, n’en est pas une.

Si la France surclasse la Russie en matière d’exportation, c’est en grande partie grâce à la chute des ventes russes, accaparées par le front ukrainien. En clair, elle profite d’un vide plus qu’elle ne domine réellement le secteur. De plus, la France vend avant tout du matériel de luxe : des Rafale à 150 millions d’euros pièce, des sous-marins à plusieurs milliards, et autres équipements ultra-spécialisés. Ce n’est pas la quantité qui fait sa force à l’international, mais la valeur colossale de chaque vente.

Ce succès à l’exportation ne signifie pas pour autant que l’armée française roule sur l’or. La défense nationale repose sur des choix budgétaires bien distincts des commandes passées par des clients étrangers. Dassault peut assembler des Rafale à la chaîne, si l’État n’en achète pas, nos escadrons ne se rempliront pas par miracle. Et c’est là que le bât blesse : selon le ministère des Armées, il manquerait actuellement une trentaine de Rafale, plusieurs frégates et des canons Caesar – soit précisément ce que la France vend le mieux à l’étranger.

Mais la grande explication de cette pénurie est ailleurs : la France a fait le pari du nucléaire. Pas celui des centrales, mais bien de la dissuasion atomique, qui engloutit une part gigantesque du budget militaire. Avec 6,4 milliards d’euros annuels dédiés à son entretien et à sa modernisation, soit 13 % du budget total, la force de frappe nucléaire capte des ressources qui pourraient équiper bien davantage nos forces conventionnelles. Pour le prix, on pourrait financer les Rafale manquants, ajouter une frégate et s’offrir une belle quantité de munitions…

En attendant, l’État continue d’investir, mais pas au rythme nécessaire pour combler les lacunes rapidement. La France consacre 2,1 % de son PIB à sa défense, soit environ 50 milliards d’euros, quand le ministre des Armées Sébastien Lecornu estime qu’il faudrait grimper à 90 milliards pour atteindre un « point de forme convenable ».

Toutefois, si un conflit majeur éclatait, l’État pourrait exiger la priorité sur les productions nationales, comme le fait la Russie. Mais pour l’instant, la France continue de jongler entre sa vitrine d’exportation et les besoins de son armée, au risque de se retrouver, un jour, à court de munitions sur son propre terrain.

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