Vers une rétrogradation ? Moody’s s’apprête à évaluer la note de la dette française

25 octobre, 2024 / Entrevue

L’agence de notation Moody’s s’apprête à dévoiler son évaluation de la note de la dette souveraine de la France, un événement particulièrement critique dans le contexte actuel de dérive des comptes publics. Les observateurs redoutent un abaissement de la note, alors que le gouvernement débat d’un projet de budget 2025 visant à réduire le déficit public à 5 % du PIB par le biais d’une économie de 60 milliards d’euros.

Actuellement, Moody’s attribue à la France une note de Aa2, un cran au-dessus des autres grandes agences, Fitch et S&P, qui notent le pays AA-. Toutefois, des experts comme Éric Dor, directeur des études économiques à l’IESEG School of Management, estiment que la probabilité d’une dégradation est élevée. Il souligne que les justifications des écarts de notation entre la France et des pays moins bien notés deviennent de plus en plus difficiles, surtout compte tenu des performances macroéconomiques souvent inférieures de la France.

Une rétrogradation aurait des conséquences directes sur les taux d’intérêt auxquels la France emprunte sur les marchés, aggravant une situation déjà tendue en raison des difficultés budgétaires et de l’instabilité politique post-élections législatives. Bien que la dette française continue d’attirer les investisseurs, ses taux d’intérêt se rapprochent désormais de ceux de pays comme le Portugal ou l’Espagne, perçus comme plus risqués.

Le ministre de l’Économie, Antoine Armand, a reconnu que la France se retrouve isolée en Europe en matière de déficit et de dette, appelant à des mesures urgentes. Actuellement, la charge de la dette représente plus de 50 milliards d’euros, devenant le deuxième poste budgétaire après l’éducation. Cette situation pourrait changer, avec des prévisions indiquant que la charge de la dette pourrait devenir le premier poste budgétaire d’ici 2027, limitant encore davantage les marges de manœuvre financière du gouvernement.

Pour restaurer la crédibilité de la France, le gouvernement projette de réduire les dépenses publiques et d’augmenter les impôts des entreprises et des contribuables aisés. Cependant, ces mesures rencontrent des obstacles dans une Assemblée nationale fragmentée, où le gouvernement est en position minoritaire. Les atouts de la France, notamment son économie diversifiée et ses systèmes fiscal et bancaire solides, pourraient s’avérer insuffisants face aux défis d’obtenir une majorité pour adopter les réformes nécessaires.

Moody’s annoncera sa décision deux semaines après que Fitch a placé la France sous perspective négative, sans abaisser la note, malgré des risques croissants et des doutes sur les prévisions officielles. L’agence S&P doit également se prononcer le 29 novembre, après avoir abaissé la note française de AA à AA- en mai dernier.

Dans un contexte économique incertain, la note de Moody’s sera un indicateur crucial de la trajectoire financière de la France, un signal important pour les investisseurs internationaux, alors que le pays doit faire face à des taux d’intérêt déjà supérieurs à ceux de ses voisins européens.