Vers un shutdown à la française ? analyse des risques en cas de blocage du budget 2025

Entrevue 1

La France est confrontée à un dilemme budgétaire sans précédent, exacerbé par l’absence d’un gouvernement pleinement fonctionnel et des délais constitutionnels rigides. Alors que le calendrier pour l’adoption du budget 2025 se resserre, plusieurs acteurs clés expriment leur inquiétude face à la possibilité d’un « shutdown » à l’américaine, une situation où l’État se retrouve sans les fonds nécessaires pour fonctionner normalement.

Le cadre constitutionnel et les défis actuels

La Constitution de la Ve République fixe des échéances strictes pour l’adoption du budget de l’État, nécessitant que le projet de loi de finances soit soumis à l’Assemblée nationale au plus tard le premier mardi d’octobre. Cependant, les complications politiques actuelles, notamment l’absence d’un Premier ministre et la distribution fragmentée du pouvoir à l’Assemblée, compliquent ce processus. Les documents préparatoires essentiels, comme les « lettres plafonds », n’ont toujours pas été distribués, ce qui augmente la tension parmi les législateurs.

Scénarios de crise et solutions Juridiques

Dans le scénario où les délais ne sont pas respectés ou si un vote de censure renverse le gouvernement, la France pourrait théoriquement se diriger vers un blocage budgétaire. Cependant, plusieurs dispositifs constitutionnels et légaux préviennent un tel scénario :

Adoption par ordonnance : Si le Parlement ne se prononce pas dans les temps, l’Article 47 de la Constitution permet au gouvernement de mettre en œuvre les dispositions du projet de loi par ordonnance, assurant ainsi la continuité des opérations gouvernementales et la collecte des impôts.

Loi spéciale en cas de crise : En cas de crise majeure, une « loi spéciale » pourrait être adoptée entre le 11 et le 19 décembre, permettant au gouvernement de lever les mêmes impôts qu’en 2024 et de maintenir les dépenses par décret au niveau de l’année précédente. Cette mesure, bien que radicale, garantirait la continuité des services essentiels.

Gestion des crédits par décret : Si nécessaire, le gouvernement pourrait utiliser des décrets pour ouvrir les crédits relatifs aux services votés, assurant le fonctionnement minimal de l’État.

Analyse politique et risques

Politiquement, aucun parti majeur n’a intérêt à provoquer un « shutdown ». Plusieurs parlementaires, comme Bruno Retailleau, soulignent que même des figures opposantes comme Marine Le Pen éviteraient de pousser le gouvernement à une extrémité pareille, préférant maintenir une image de respectabilité. Toutefois, les implications économiques d’un budget « pétrifié », notamment en termes de non-ajustement à l’inflation, pourraient poser des défis substantiels, notamment en ce qui concerne la dette souveraine française sur les marchés internationaux.

Conclusion

Bien que la situation budgétaire de la France soit complexe et remplie d’incertitudes politiques, les structures constitutionnelles et les mécanismes de sécurité juridiques sont en place pour éviter un arrêt complet des opérations gouvernementales. Néanmoins, la nécessité d’un accord politique reste cruciale pour assurer la stabilité financière et économique du pays à long terme.

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