Taxer les exilés : Lucie Castets souhaite un rétablissement complet de l’« exit tax »

22 août, 2024 / Entrevue

Dans un contexte de débat fiscal intense, Lucie Castets, candidate du Nouveau Front populaire pour Matignon, a exprimé son désir de rétablir l’« exit tax » dans sa version originelle, après sa réduction par Emmanuel Macron. Cette taxe, instaurée en 2011 sous Nicolas Sarkozy, vise à freiner l’exil fiscal en taxant les plus-values latentes des résidents français transférant leur domicile à l’étranger. Mais en quoi consiste cette mesure et comment a-t-elle évolué ?

Qu’est-ce que l’« exit tax » ?

L’« exit tax » a été conçue pour éviter que des Français ne partent à l’étranger pour échapper à l’imposition sur les plus-values. En pratique, elle taxe à 30% les plus-values théoriques sur les titres détenus par des résidents français qui déménagent leur résidence fiscale hors de France. Au départ, seuls les contribuables possédant des parts d’une valeur supérieure à 1,3 million d’euros ou détenant 1% du capital d’une entreprise étaient concernés. Cette taxe devait être payée immédiatement, bien que le paiement puisse être différé jusqu’à la vente des titres. Si les titres n’étaient pas vendus dans les quinze ans suivant le départ, la taxe était annulée.

Évolutions et controverses

Depuis son introduction, l’« exit tax » a subi plusieurs réformes. En 2014, sous François Hollande, les critères d’application ont été modifiés : le seuil de participation est passé de 1% à 50% pour ne concerner que les actionnaires majoritaires, et le seuil de valeur a été réduit à 800 000 euros. En 2018, Emmanuel Macron a supprimé l’« exit tax », la remplaçant par une taxe anti-abus plus souple. La nouvelle taxe accorde une exonération plus rapide, après seulement deux ans pour les parts vendues ou cinq ans pour les opérations de moindre valeur.

Les défis de l’« exit tax »

L’efficacité de l’« exit tax » a toujours été controversée. Malgré une prévision de recettes de 200 millions d’euros par an lors de sa création, elle a généré seulement 53 millions d’euros en 2011 et 70 millions d’euros en 2017. En 2016, une étude avait estimé que l’impôt aurait pu rapporter jusqu’à 803 millions d’euros, mais le suivi des contribuables sur une période prolongée a prouvé difficile pour l’administration fiscale.

Certains critiques affirment que l’« exit tax » ne dissuade pas nécessairement les Français de quitter le pays ; au contraire, elle pourrait encourager les entrepreneurs à s’établir à l’étranger pour éviter l’accumulation de plus-values latentes. En revanche, l’effet dissuasif est également cité comme un facteur contribuant aux faibles recettes de l’impôt.

Perspectives et débats

Lucie Castets propose de rétablir l’« exit tax » dans sa version antérieure à 2018, avec un délai d’exonération de quinze ans. Selon une estimation de l’Institut Montaigne, ce retour à l’ancien régime pourrait générer environ 67 millions d’euros par an. Toutefois, cette mesure pourrait également raviver le débat sur son efficacité et son impact potentiel sur l’attractivité de la France pour les entreprises et les investisseurs.

En somme, la proposition de Castets de rétablir l’« exit tax » dans sa version originelle s’inscrit dans un contexte de recherche de solutions pour contrer l’exil fiscal. Reste à voir comment cette mesure sera accueillie et quelles seront ses répercussions sur le paysage fiscal français.