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Les bonnes relations de Marine Le Pen avec le Moyen Orient

Pour certains, c’est un paradoxe. Pour d’autres, tout s’explique. Georges Malbrunot est catégorique. Marine Le Pen entretient de bonnes relations avec une majeure partie des pays du Moyen Orient.

Le grand reporter, expert de la diplomatie au Moyen Orient pour Le Figaro, dévoile un état des lieux intéressant des relations entre les pays du Moyen Orient et Marine Le Pen. La représentante numéro 1 du Rassemblement National aurait des alliés parmi les dirigeants des pays les plus influents de cette région du monde.

Dans un tweet explicatif, Georges Malbrunot apporte « Quelques éléments de background pour comprendre cet apparent paradoxe ».

« Au Moyen-Orient, Marine Le Pen et son parti entretiennent de bonnes relations avec les régimes autoritaires d’Egypte et des Emirats arabes unis, et de mauvaises avec le Qatar, en raison de son soutien à l’islam politique au Moyen-Orient et au-delà. » Georges Malbrunot fait ici référence au soutien affirmé du Qatar aux Frères Musulmans, organisation considérée comme terroriste en France.

« Avec l’Arabie, ses relations se sont améliorées depuis une dizaine d’années », estime le journaliste, « probablement sous l’influence précisément des alliés émiriens de Mme Le Pen, qui ont pu lui conseiller d’adoucir à un moment donné ses critiques contre l’Arabie. Comme par hasard, le parti de Mme Le Pen fut plutôt discret dans ses critiques contre MBS au moment de l’horrible assassinat du dissident saoudien Jamal Khashoggi par des hommes de Riyad, fin 2018. Ce qui constituait une réelle surprise. »

« D’autre part, les réformes sociétales menées par l’Arabie de MBS – plus de droits aux femmes, mise à l’écart de la police religieuse et plus largement marginalisation de l’establishment religieux – couplées à la volonté saoudienne de normaliser ses relations avec Israël – nouvel allié du RN au MO – ne peuvent que satisfaire Mme Le Pen, qui ne se prive probablement pas de le dire à Mohamed Abdelkarim al-Issa, le patron de la Ligue islamique mondiale, lors de leurs rencontres en France, comme vient de le révéler ce dernier. »

En effet, le patron saoudien de la Ligue islamique mondiale (LIM) assume désormais sa « bonne relation » avec Marine Le Pen.

« Nous avons une bonne relation avec elle. Chaque fois que nous allons en France, nous rencontrons Mme Le Pen », a déclaré lundi Mohammad bin Abdul Karim Issa dans une intervention devant un think-tank à Londres, selon des propos rapportés par le site Middleeasteye.

« Nous dialoguons en amis. Nous partageons une amitié fondée sur une compréhension mutuelle », a ajouté l’ancien ministre saoudien de la Justice, qui dirige la LIM, depuis 2016.

« Quand je suis en France, je dois respecter les valeurs de la république. Sinon, comment pourrais-je entrer dans un pays sans en respecter ses valeurs ? », explique Mohammad bin Abdul Karim Issa. « Mme Le Pen m’a demandé si c’était cela l’islam? Je lui ai dit que oui, c’est l’islam ».

Les pays arabes redoutent le RN et un changement de politique étrangère ?

Une mobilisation des pays arabes contre le Rassemblement National ? Avec la possible arrivée au pouvoir en France du RN, certains partenaires de la France s’inquiètent, d’après Hasni Abidi, politilogue et spécialiste du Moyen Orient.

Le scrutin de dimanche pourrait-il changer les bonnes relation entre la France et la plupart des pays arabes ? C’est en tout cas le propos d’Hasni Abidi, politologue algérien et suisse, directeur du Centre d’études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen (CERMAM) à Genève.

Selon lui, « une véritable mobilisation » de ces Etats est réalisée en ce moment, à un peu plus de 24 heures du premier tour élections législatives, contre la possible prise de pouvoir du parti de Jordan Bardella.

« Ils redoutent un changement de politique étrangère » et auraient « des craintes sur leurs investissements et sur le soutien français dans des dossiers, particulièrement l’Iran. »

« D’autres États », sans les citer, « redoutent un durcissement des politiques en matière d’accueil et de mobilité et sur les relations bilatérales ».

Parmi les enjeux économiques clés de la France, l’Arabie Saoudite est le premier pays auquel penser. Encore récemment, à l’occasion du Sommet Vision Golfe 2024, le port de Fos-Marseille a signé un accord de partenariat stratégique avec la Saudi Ports Authority (Mawani), l’autorité des ports saoudiens. De même, l’hydrogène est devenu un enjeu national pour les deux pays. Et une coopération s’opère depuis des mois à ce sujet.

Mais une arrivée au pouvoir du RN changerait-il réellement la donne ? De quoi auraient peur ces pays étrangers ? Pourquoi freineraient-ils leurs investissements ?

L’Arabie Saoudite, pour ne citer que ce grand pays leader du Moyen Orient, est membre des BRICS, dont la Russie ou la Chine font partie. S’associer ou tisser des liens économiques avec un pays autoritaire n’a jamais gêné le Royaume. Même avec la montée en puissance dans les urnes du RN, la France reste très loin de ce type de gouvernance. De même, les pays arabes ne sont pas les exemples auxquels on pense quand on parle de droits de l’Homme en général.

Dans un autre tweet, en arabe cette fois, Hasni Abidi précise sa pensée : « Quand le leader du Rassemblement national d’extrême droite affirme que la position de président de la République est cérémoniale et que le prochain Premier ministre est celui qui mène la politique étrangère, Marine Le Pen souhaite un changement radical de politique étrangère basé sur sur une approche du changement de l’intérieur et sur l’utilisation du pouvoir pour le saper. C’est ce qui suscite la crainte des élites françaises et européennes, qui craignent une répétition de l’expérience d’Orban en Hongrie. »

Le seul élément qui s’entend actuellement serait en effet concernant les décisions de politiques étrangères. Avec un possible changement de stratégie, Emmanuel Macron laissant alors la main à son nouveau Premier ministre.