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Un dissident azéri assassiné chez lui à Mulhouse par trois hommes cagoulés

Encore une histoire sordide. Qui pourrait avoir des ramifications jusqu’en Azerbaïdjan, la dictature du président Aliyev qui pourchasse jusqu’en France certains dissidents. Un homme azerbaïdjanais de 62 ans, réfugié à Mulhouse, a été assassiné chez lui.

Il a lutté toute sa vie contre le pouvoir despote de la famille Aliyev en Azerbaïdjan. Il vient de perdre la vie au prix de la liberté tant espérée. Sauvagement poignardé dimanche par trois individus cagoulés et très organisés.

Vidadi Isgandarli, 62 ans, avait obtenu l’asile en France en 2017. Depuis, il vivait à Mulhouse sans jamais être certain d’être en totale sécurité. Attaqué à son domicile tôt le matin par trois hommes, touché par des coups de couteau pendant son sommeil, l’hommes s’est débattu et a réussi à appeler des secours.

Ce critique du gouvernement d’Ilham Aliyev a « consacré toute sa vie à la politique en s’opposant au régime actuel. Nous sommes sûrs que le gouvernement azerbaïdjanais a envoyé ces tueurs« , a réagi le frère de la victime au Figaro. Ce dernier indique avoir déposé plainte. Une enquête pour « tentative de meurtre » avait été ouverte et confiée au Service Régional de Police Judiciaire, comme l’avait indiqué le média Nouvelles d’Arménie.

Courant 2011, Vidadi Isgandarli était arrêté en Azerbaïdjan lors d’une manifestation anti-régime. Condamné à trois ans de prison, il a aussi été accusé d’avoir entravé le processus de vote lors des législatives de 2010. Il avait alors volé des bulletins de vote qu’il jugeait falsifiés. Amnistié 18 mois plus tard, il s’était exilé en France en 2017 avec sa femme et ses deux enfants. Pour mieux être traqué ?

Touchée par « une quinzaine de coups de couteau » selon le procureur, la victime a été admis en soins intensifs à l’hôpital de Mulhouse, où il est resté dans un état critique avec une aide respiratoire, avant de décéder mardi matin.

Si « aucun lien n’a été établi à ce jour entre la tentative de meurtre et les activités politiques« , selon le parquet, tous les regards se tournent vers l’Azerbaïdjan.

Son gouvernement est coutumier du fait. Les opposants de Bakou sont régulièrement traqués partout dans le monde, et notamment en France. Le blogueur Mahammad Mirzali (30 ans) a été victime de cinq tentatives d’assassinat depuis son arrivée en France en 2016. Il vit depuis deux ans sous haute protection policière. Cette protection a par ailleurs été renforcée suite au meurtre de Vidadi Isgandarli.

Selon le média Intelligence Online, les enquêteurs auraient déjà identifié de hauts responsables azéris, dont un ancien diplomate, comme les commanditaires de l’attaque.

Le journaliste azéri Rahim Shaliev avait déclaré avec justesse, en mai dernier : « Être azerbaïdjanais, c’est vivre en terre perse, lire de la littérature russe, avoir une architecture arménienne, pratiquer la religion arabe, célébrer les fêtes talish, acheter des technologies occidentales, écouter de la musique caucasienne, boire du vin géorgien… mais en fin de compte, prétendre que tout cela vous appartient, et de haïr tous les peuples qui t’ont donné toute cette beauté…« 

Haut Karabakh : Un an après l’épuration ethnique, l’Azerbaïdjan s’active pour effacer toute trace des Chrétiens et des Arméniens

Viols, massacres, humiliations, êtres humains décapités, diffusion d’images sordides sur les réseaux sociaux… L’Azerbaïdjan ne s’est arrêtée à rien il y a tout juste un an afin de prendre possession d’une terre ancestralement peuplée d’Arméniens, le Haut Karabakh.

Une République autonome, une démocratie auto-proclamée Artsakh, est tombée dans l’indifférence générale fin 2023. Des terres, des souvenirs, des biens arrachés par la dictature azérie.

Pourtant, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qualifiait en 2022 l’Azerbaïdjan de « partenaire digne de confiance pour l’Union Européenne« . Il fallait oser.

Quelques mois plus tard, la dictature entreprenait des avancées militaires décisives, massacrant civils et personnalités politiques, capturant des otages, commettant aussi ces dernières années de nombreux crimes de guerre et bafouant les lois internationales.

Avec objectivité (l‘opposé de la propagande permanente de l’Azerbaïdjan, dont la diplomatie du caviar fonctionne à merveille avec certaines personnalités politiques françaises), les équipes de France 2 ont réalisé un focus intéressant sur l’exode des Arméniens, une nouvelle fois obligés de fuir. Plus de 100 ans après le premier Génocide du XXe siècle. Que la Turquie continue de nier.

Aujourd’hui, France TV constate comme nous que les journalistes n’ont pas le droit de se rendre dans l’ex-Artsakh. La dictature azérie souhaite tout effacer pour tout reconstruire et refaire l’histoire. Pour rappel, l’Azerbaïdjan est un des pires Etats au monde en termes de droits de l’Homme, droits de la presse, droits des femmes. Loin derrière la Russie ou certains pays du Moyen Orient, pourtant plus souvent pointés du doigt. L’Azerbaïdjan possède l’art de se faire oublier.

Et l’art de faire oublier la présence des Arméniens et des Chrétiens dans cette région. Comme le montrent les images de drones de France Télévision dans ce reportage, on peut voir que tous les noms arméniens ont été rebaptisés : panneaux, villes… Une croix chrétienne a été brisée en deux parties.

Dans le village de Sushi, l’église a été « amputée de ses deux clochers« , puis rasée cette année. D’autres églises ont été transformées en mosquées.

Le Parlement du Haut Karabakh, en fonction depuis 1995, a laissé place à… un terrain vague. Table rase du passé et réécriture de l’Histoire. Un grand classique azéri.

Pour couronner le tout, pour forcer les citoyens azéris à peupler ce territoire « grand comme la Savoie« , le dictateur Aliyev a mis les grands moyens : les étudiants peuvent s’inscrire ici à l’Université gratuitement. De même, les logements leurs sont aussi offerts par l’Etat gazier.

« Toute personne qui fait des efforts est récompensée« , explique une étudiante dont le lavage de cerveau semble avoir fonctionné parfaitement. À moins que la peur de la répression la force à tenir de tels propos.

« Le grand retour« , c’est le nom de code de ce plan pour occuper les terres arméniennes. Le hic, l’Azerbaïdjan est un pays né après la première guerre mondiale, de la seule volonté de Staline, pour qui « diviser pour mieux régner » était un leitmotiv. Ainsi, il créé l’Etat azéri, redessine les frontières arméniennes arbitrairement… et on voit donc beaucoup d’Arméniens, notamment au Haut Karabakh, finalement vivre officiellement en terres azéries.

Après la chute du mur de Berlin, les cartes sont redistribuées, les Arméniens se battent pour leurs terres qu’ils habitent depuis des siècles et remportent les premières guerres d’indépendance, sous la houlette du militaire Monte Melkonian. Le Haut Karabakh proclame son indépendance, devient une République, s’affirme en tant que démocratie dans une région du monde dominée par les Etats autoritaires. Par la suite, pendant plus de 20 ans, l’Azerbaïdjan utilisera chaque année l’équivalent du PIB de l’Arménie pour renforcer son armée. Naïve, l’Arménie ne se souciera pas spécialement de renforcer ses frontières ou son armée.

Dans l’indifférence générale, la dictature procédera alors à une épuration ethnique immonde en 2023, forçant par la violence et la haine vieillards, femmes et enfants à fuir sur les routes. Environ 700 000 exilés, sans la moindre sanction internationale.