Sébastien Chenu (RN) élu à la tête d’une commission à l’Assemblée grâce aux voix macronistes

Entrevue 1

Sébastien Chenu, député du Rassemblement national (RN) et ancien vice-président de l’Assemblée nationale, a créé la surprise ce mercredi en étant élu président de la commission chargée de vérifier et d’apurer les comptes de l’Assemblée nationale. Une élection marquée par un soutien inattendu : celui de plusieurs députés macronistes.

Un duel serré contre un socialiste

C’est au terme d’un vote tendu que Chenu a remporté ce poste réservé à l’opposition, face au socialiste Philippe Brun. Arrivé à égalité avec ce dernier au dernier tour de scrutin, Chenu l’a emporté grâce à une règle de l’Assemblée qui privilégie le candidat le plus âgé en cas d’égalité. Ce dénouement inattendu s’explique en partie par le soutien de deux députés de la majorité présidentielle, puisque le RN, avec seulement trois membres siégeant dans cette commission, n’aurait pas pu obtenir cinq voix sans cette aide externe.

Philippe Brun, visiblement agacé par ce retournement de situation, n’a pas tardé à réagir, dénonçant sur X (anciennement Twitter) le soutien des macronistes à un député du RN : « Le RN vient de gagner la présidence de la commission grâce aux votes des députés macronistes. Qu’on ne vienne plus nous parler de front républicain. »

Bien que les responsables du Rassemblement national nient toute alliance formelle avec la majorité présidentielle, cette élection a soulevé de nombreuses questions sur l’état actuel des rapports de force au sein de l’Assemblée. Un cadre du RN affirme ainsi que « cette élection était impossible à imaginer » et déplore « le manque de cohérence » au sein des macronistes. Pourtant, certains députés de la majorité ne cachent pas qu’ils envisagent des compromis stratégiques avec le RN. Une députée proche de Gabriel Attal, ministre de l’Éducation nationale, anticipait d’ailleurs ce rapprochement avant même le vote, expliquant qu’en l’absence de cohésion interne, des macronistes pourraient choisir de faire des « deals » avec d’autres forces politiques, y compris le RN.

Un malaise croissant chez les socialistes et les écologistes

L’élection de Chenu n’est pas un cas isolé. Au cours de la même journée, plusieurs commissions ont vu émerger des alliances similaires entre macronistes et RN, suscitant de vives réactions dans les rangs de la gauche. Sandra Regol, députée écologiste, n’a pas manqué de dénoncer un « transfert de voix » en faveur des candidats RN, notamment lors de la présidence de la délégation aux droits des femmes, où une candidate macroniste a été élue après avoir négocié le retrait du candidat RN.

Ces alliances ponctuelles, bien qu’elles ne soient pas officiellement reconnues par la majorité présidentielle, laissent entrevoir une évolution politique où les frontières traditionnelles entre les blocs se brouillent. La gauche, pour sa part, accuse les macronistes de trahir leurs principes en privilégiant des gains tactiques à court terme.

Vers un bouleversement de l’équilibre politique à l’Assemblée ?

L’élection de Sébastien Chenu pourrait bien marquer un tournant dans les relations entre les partis politiques au sein de l’hémicycle. Le prochain test pour ce fragile équilibre aura lieu lors de l’élection du nouveau vice-président de l’Assemblée, un poste laissé vacant par la députée LR Annie Genevard, désormais Ministre de l’agriculture. Yoann Gillet, un autre élu RN, pourrait être le prochain à bénéficier d’un soutien macroniste inattendu.

Thumbnail