Mediapart a publié, le 10 juillet, des révélations troublantes concernant l’implication de BFMTV et de certains de ses journalistes dans une campagne de communication visant à défendre Nicolas Sarkozy, empêtré dans l’affaire du financement libyen. Les informations proviennent de SMS et de conversations téléphoniques récupérés dans le cadre d’une enquête sur la fausse rétractation de Ziad Takieddine, qui a accusé Sarkozy d’avoir reçu des fonds libyens pour sa campagne présidentielle de 2007.
Des liens étroits entre journalistes et l’entourage de Sarkozy
Les échanges montrent une proximité surprenante entre les journalistes de BFMTV et l’équipe de communication de l’ancien Président. Véronique Waché, chargée de communication de Sarkozy, a envoyé plusieurs messages aux journalistes, leur demandant notamment d’organiser des interviews et des diffusions à des moments stratégiques. Ruth Elkrief, l’une des figures emblématiques de la chaîne, a répondu par un message qui illustre cette collusion : « Je suis là, je pense à vous, et si vous avez envie de vous exprimer je suis à votre disposition, on peut monter ce que vous voulez ! Je t’embrasse fort et transmets mes amitiés à NS ».
La rétractation douteuse de Ziad Takieddine
Le 11 novembre 2020, Ziad Takieddine, qui avait précédemment affirmé que Sarkozy avait reçu de l’argent de Mouammar Kadhafi, se rétracte de manière spectaculaire dans une interview diffusée par BFMTV. Les enquêteurs révèlent plus tard que ce revirement aurait été monnayé. Dans ce contexte, BFMTV a mobilisé ses ressources pour offrir une couverture médiatique favorable à Sarkozy. Marc-Olivier Fogiel, directeur général de la chaîne, coordonnait les diffusions avec Waché pour maximiser l’impact médiatique de ces déclarations.
Tensions et critiques internes
Lors de la couverture de la rétractation de Takieddine, des tensions apparaissent entre les journalistes de la chaîne. Bruno Jeudy, éditorialiste de BFMTV, critique ouvertement sa collègue Sarah-Lou Cohen pour son approche plus mesurée de l’affaire, illustrant une volonté de certains journalistes de favoriser une narration pro-Sarkozy.
Une interview controversée et bien reçue
Deux jours après la rétractation de Takieddine, Nicolas Sarkozy accorde une interview à Ruth Elkrief. Malgré une échange tendu, les coulisses montrent que cette interview a été soigneusement orchestrée pour plaire à Sarkozy et son équipe. Arthur Dreyfuss, directeur général d’Altice Media (propriétaire de BFMTV), et les journalistes principaux de la chaîne se sont assurés que l’ancien président était satisfait de son passage.
Réactions et défense des journalistes
Les révélations de Mediapart ont suscité des réactions indignées, notamment de la part de journalistes et de certains politiques. Marc-Olivier Fogiel a défendu son équipe en affirmant que les journalistes travaillaient en toute indépendance et sans consignes spécifiques. Bruno Jeudy a qualifié ses messages de « maladroits » et Ruth Elkrief a évoqué une « opportunité professionnelle » dans le rebondissement de l’affaire.