La domination de François Bayrou, l’absence de direction claire et l’instabilité politique mettent en question l’avenir du MoDem. Ce courant centriste, pilier de la politique française depuis des décennies, pourra-t-il survivre à l’après-Bayrou ?
L’année 2024 devait être marquante pour le MoDem, marquée par le centenaire de la démocratie chrétienne, célébré lors du congrès national à Blois en mars. Ce rendez-vous aurait dû offrir une « clarification » tant espérée au sein du parti centriste. Pourtant, la confusion persiste, notamment depuis le début du second mandat d’Emmanuel Macron, où certains cadres ne savent plus quelle direction suivre.
Ce flou rappelle les derniers jours de l’UDF dans les années 2000, déchirée entre ceux prônant une alliance avec l’UMP et ceux, emmenés par François Bayrou, défendant l’indépendance du parti. Cette division avait abouti en 2007 à la scission entre le MoDem et le Nouveau Centre.
Une vision centrée sur 2027
François Bayrou, maire de Pau, reste obnubilé par l’élection présidentielle de 2027, au point de négliger la préparation de sa succession, selon ses proches. Pour lui, il est impensable de renoncer à ses ambitions, malgré les attentes de certains membres du parti qui réclament un passage de témoin. « Il n’a jamais renoncé à son ambition, c’est une souffrance pour lui », confie un proche. Mais pour le MoDem, cela devient une préoccupation grandissante : « Personne n’ose le contredire. Il a les yeux rivés sur 2027 alors qu’il devrait préparer la transmission », s’inquiète un parlementaire.
En réalité, François Bayrou semble peu enclin à préparer son départ. Un de ses anciens alliés en est persuadé : « Il n’a pas envie de transmettre. Autrement, il n’aurait pas tout fait pour confondre le parti avec son nom. » Cette crainte grandit au sein du MoDem, où certains redoutent que le parti ne se désintègre après le départ de son fondateur.
Le spectre d’une fusion avec Renaissance
Au sein de la majorité présidentielle, cette inquiétude est parfois exploitée pour promouvoir l’idée d’une fusion avec Renaissance, rappelant l’époque de la création de l’UMP : « Entre eux et nous, c’est un peu bonnet blanc, blanc bonnet », argumente un député d’Ensemble pour la République (EPR).
Mais quelle place reste-t-il aujourd’hui pour la sensibilité démocrate-chrétienne au sein du MoDem ? Certains membres historiques du parti se montrent critiques. Lors des débats sur des sujets de société comme la fin de vie ou l’extension de la PMA, le MoDem a suivi la ligne du gouvernement sans grande résistance. « Peut-on encore revendiquer un héritage démocrate-chrétien ? » s’interroge un cadre du parti.
L’avenir du MoDem sans Bayrou
Olivier Falorni, député, se veut rassurant : « Il ne faut pas confondre dogme et sensibilité. La seconde s’accommode de l’évolution du monde, c’est pour cela qu’elle perdure. » Selon lui, le MoDem survivra à François Bayrou. Cependant, la question de l’héritage reste posée. Deux noms reviennent régulièrement : ceux des anciens ministres Marc Fesneau et Jean-Noël Barrot. « Ils ont des qualités, certes, mais ni l’un ni l’autre n’est Jules César », plaisante-t-on en interne.
Perdus plus que divisés, les héritiers de Valéry Giscard d’Estaing s’accordent sur un point : la question de la succession devra être abordée sans détour lors du prochain congrès national. Sans cela, l’idéal d’un centre indépendant, équilibrant la vie politique française depuis 1974, pourrait bien disparaître.