Mercosur : La France s’engage dans un bras de fer prolongé avec la Commission européenne

19 novembre, 2024 / Radouan Kourak

La France réaffirme son opposition ferme au traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur. Ce mardi, le gouvernement a annoncé qu’il poursuivrait « aussi longtemps que nécessaire » son bras de fer avec la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Une position soutenue par les agriculteurs français, qui intensifient leurs manifestations pour dénoncer cet accord jugé préjudiciable à leur secteur.

Un débat parlementaire à venir

Afin de solidifier sa position, le gouvernement prévoit d’organiser un débat au Parlement, suivi d’un vote. Cette initiative vise à légitimer la stratégie française et à envoyer un signal clair à Bruxelles. « Il est normal que l’Assemblée nationale se prononce sur ce sujet, qui concerne nos agriculteurs et, au-delà, l’ensemble des Français », a déclaré Maud Bregeon, porte-parole du gouvernement, soulignant l’importance de ce vote dans la défense des intérêts nationaux.

Pour la France, le traité avec le Mercosur, négocié depuis plus de deux décennies, constitue une menace majeure pour ses éleveurs. L’accord prévoit notamment des quotas d’importation de viande bovine à des droits de douane réduits ou nuls, ce qui suscite de vives inquiétudes chez les agriculteurs français. « C’est une concurrence déloyale inacceptable, incohérente avec nos engagements écologiques et climatiques », a dénoncé Maud Bregeon, citant les objectifs de l’Accord de Paris.

Le président Emmanuel Macron a également exprimé son opposition lors du sommet du G20 à Rio de Janeiro, affirmant que l’accord repose sur des « préalables caducs ». Il a proposé de « repenser la relation » entre l’UE et les pays du Mercosur, envisageant même des partenariats bilatéraux, notamment avec le Brésil, afin de protéger l’agriculture européenne.

Une mobilisation croissante des agriculteurs

Les agriculteurs français ont intensifié leurs actions ces derniers jours, soutenus par des syndicats comme la Coordination rurale, qui menace de multiplier les blocages si leurs revendications ne sont pas entendues. Maud Bregeon a appelé au calme, espérant que les manifestations se déroulent « sans dégradations des biens ou des personnes ».

La France, bien que perçue comme isolée sur ce dossier, affirme avoir le soutien d’autres pays européens. Emmanuel Macron a cité la Pologne, l’Autriche et l’Italie parmi les États partageant les préoccupations françaises. En Italie, le ministre de l’Agriculture, Francesco Lollobrigida, a déclaré que l’accord dans sa forme actuelle était inacceptable, exigeant que les règles imposées aux agriculteurs européens s’appliquent également à leurs homologues du Mercosur.

Cependant, la position européenne reste divisée. L’Allemagne et l’Espagne figurent parmi les principaux partisans de l’accord, soulignant les opportunités économiques pour l’exportation de produits manufacturés européens. Le chancelier Olaf Scholz a réitéré lundi son souhait de finaliser rapidement cet accord.

Une minorité de blocage espérée

Face à ces divergences, la France mise sur la constitution d’une minorité de blocage au sein de l’UE pour contrer la ratification de l’accord. En attendant, le gouvernement continue de plaider pour un commerce international respectueux des normes environnementales et sanitaires européennes, appelant à une révision complète des termes de l’accord avec le Mercosur.

Alors que le débat s’intensifie, l’issue de ce bras de fer pourrait avoir des répercussions majeures sur la politique commerciale européenne et sur l’avenir de l’agriculture française.