Le groupe CMI France, propriété du magnat tchèque Daniel Kretinsky, a annoncé ce jeudi 19 décembre renoncer à vendre l’hebdomadaire Marianne. Après l’échec de deux projets de cession, d’abord avec le milliardaire conservateur Pierre-Édouard Stérin l’été dernier, puis avec l’entrepreneur Jean-Martial Lefranc à l’automne, le titre demeurera finalement dans le portefeuille de CMI France, qui entend désormais le réorienter.
Conséquence de ce maintien : Natacha Polony, directrice de la rédaction depuis 2018, quitte ses fonctions exécutives mais conservera un éditorial hebdomadaire. Pour lui succéder, CMI a choisi Frédéric Taddeï, figure bien connue du paysage audiovisuel français. Le journaliste, passé par les émissions « Ce soir (ou jamais !) » sur France Télévisions et « Interdit d’interdire » sur RT France, prendra officiellement ses fonctions le 1er mars prochain. Il est actuellement présent à l’antenne d’Europe 1 (radio contrôlée par Vincent Bolloré) et jouit d’une réputation d’« agitateur culturel » féru de débat et de pluralisme.
Cette réorganisation s’accompagnera d’un plan stratégique visant à remettre Marianne à l’équilibre financier. Parmi les mesures prévues, une réduction de la pagination – le magazine pourrait passer d’une cinquantaine de pages à une trentaine en 2025 – ainsi que de probables coupes dans les équipes du service Enquête et dans les moyens alloués au site web. Pour les journalistes souhaitant quitter le navire, une clause de conscience sera ouverte dès le mois de janvier, permettant des départs indemnisés.
Ces dernières années, Marianne s’était illustré par une ligne éditoriale souverainiste, farouchement laïque, antilibérale en économie et plutôt critique envers les élites. Un positionnement qui tranchait avec le profil de Daniel Kretinsky, entrepreneur libéral, pro-européen, et qui avait motivé sa tentative de vendre le titre. Désormais fermement maintenu dans le giron du milliardaire tchèque, Marianne devra trouver un nouvel équilibre rédactionnel et économique sous la houlette de Frédéric Taddeï. Ce dernier, soutenu par Jean-François Kahn, cofondateur de Marianne, promet de perpétuer l’esprit critique et le pluralisme de l’hebdomadaire, tout en restant fidèle aux valeurs républicaines, sociales et laïques qui ont forgé son identité.