Ce vendredi, Emmanuel Macron atterrit à Djibouti pour partager un repas de Noël avec les 1 500 soldats français stationnés dans ce pays stratégique de la Corne de l’Afrique. Dans un contexte de retrait progressif des forces françaises du continent, cette base, la plus importante en dehors de l’Hexagone, symbolise les efforts de Paris pour maintenir une présence militaire tout en redéfinissant son rôle en Afrique.
Djibouti : dernier bastion militaire majeur de la France en Afrique
Loin des revers subis au Sahel, au Tchad et au Sénégal, Djibouti échappe à la vague de fermetures qui a touché les bases militaires françaises sur le continent. Ce territoire, tourné vers la mer Rouge, l’océan Indien et le Moyen-Orient, occupe une place clé dans la stratégie de défense française. En juillet dernier, Emmanuel Macron et son homologue djiboutien Ismaïl Omar Guelleh ont signé le renouvellement du traité de coopération militaire, renforçant ce partenariat stratégique.
« Ce pôle n’est pas tourné vers l’Afrique, mais vers le Proche-Orient, l’Indo-Pacifique et la mer Rouge, » souligne Antoine Glaser, spécialiste de la géopolitique africaine. La base accueille non seulement des militaires français, mais cohabite aussi avec des contingents américains, chinois, italiens et japonais, faisant de Djibouti un carrefour de coopérations militaires internationales.
La présence française à Djibouti ne va pas sans concessions. Historiquement gratuite, elle coûte aujourd’hui près de 70 à 85 millions d’euros par an. Cet investissement témoigne de la volonté de Paris de maintenir son influence dans une région hautement stratégique où transite une part importante du commerce mondial. Outre le volet militaire, Emmanuel Macron profitera de cette visite pour échanger avec son homologue djiboutien sur des sujets régionaux, tels que la guerre au Soudan et les conflits en Somalie. La France s’engage également dans une coopération spatiale avec Djibouti, visant notamment à lutter contre le changement climatique.
Le défi de réinventer les relations franco-africaines
Cette visite s’inscrit dans un contexte de repositionnement de la politique africaine de la France. Après avoir été chassée de plusieurs pays du Sahel, Paris conserve des bases en Côte d’Ivoire et au Gabon, mais avec des effectifs réduits et un recentrage sur des missions de formation. Ce rééquilibrage reflète une volonté de rompre avec l’image de puissance néo-coloniale, mal acceptée par les populations locales, notamment les jeunes.
En Éthiopie, où il se rendra samedi, Emmanuel Macron poursuivra ce repositionnement en inaugurant le Palais national restauré avec le soutien de l’Agence française de développement. Cette visite, qui symbolise l’ouverture à des partenariats hors des anciennes colonies, s’accompagne de discussions sur la stabilisation régionale, deux ans après la fin de la guerre au Tigré.
Après des décennies d’une politique fondée sur des bases militaires et des liens historiques, la France peine à maintenir son influence sur un continent de plus en plus tourné vers d’autres partenaires, notamment la Chine. Emmanuel Macron, conscient de ces enjeux depuis son discours de Ouagadougou en 2017, doit aujourd’hui trouver de nouveaux outils pour reconstruire une relation plus équilibrée et débarrassée du passif colonial. L’évolution de la politique africaine française sera cruciale pour définir l’avenir de la présence française sur le continent. En attendant, Djibouti reste une exception dans une année marquée par des revers historiques pour la France en Afrique.