La mairie écologiste de Lyon explore la possibilité de renommer plusieurs rues et places portant le nom de personnalités historiques controversées. Cette initiative vise à revisiter l’héritage colonial et à offrir une lecture contemporaine des figures honorées dans l’espace public. Lors du conseil municipal du 14 novembre 2024, un premier pas a été franchi avec la décision d’ajouter une plaque explicative devant la statue du sergent Blandan, place Sathonay, dans le 1ᵉʳ arrondissement.
Contexte et symbolisme du sergent Blandan
Jean Pierre Hippolyte Blandan, héros colonial du XIXᵉ siècle, est célébré pour son rôle dans la conquête de l’Algérie. Sa statue, érigée en 1900, est cependant devenue un point de débat. Pour certains, elle incarne un passé colonial glorifié qui nécessite une contextualisation. La plaque prévue vise à informer les passants sur cette figure controversée et à « susciter des réflexions sur notre histoire et ses représentations », a précisé Sylvie Tomic, adjointe à la Mémoire, selon France 3 Auvergne-Rhône-Alpes.
Yasmine Bouagga, maire du 1ᵉʳ arrondissement, a expliqué dans une tribune publiée sur Mediapart que cette démarche reflète un effort vers « une démocratie mémorielle » permettant de corriger « les injustices et invisibilisations passées ». L’élue espère ouvrir un débat inclusif sur les noms qui façonnent l’identité collective de la ville.
Des habitants partagés
Dans le quartier de la place Sathonay, les avis divergent. Certains, comme Michèle, une résidente de longue date interrogée par France 3, estiment que cette démarche « remue des sujets inutiles » et souhaitent que la priorité soit donnée à l’entretien des monuments existants. D’autres, à l’instar de Fayssal, étudiant, voient cette contextualisation comme une opportunité éducative pour mieux comprendre les complexités de l’histoire.
Vers une réflexion plus large sur les noms de rues
Cette initiative ne se limite pas à la statue du sergent Blandan. La municipalité a également mentionné la rue Bugeaud, nommée d’après le maréchal responsable de répressions violentes en Algérie, comme un cas potentiel de débaptisation. Sylvie Tomic a souligné lors du conseil municipal que « ces changements doivent être envisagés avec prudence et parcimonie ». Une instance de réflexion sur ces questions devrait voir le jour d’ici le troisième trimestre 2025.
Un enjeu national et local
Cette démarche s’inscrit dans un débat plus large sur les monuments et noms de lieux en France, notamment dans le cadre des discussions postcoloniales. Paris a récemment renommé l’avenue Bugeaud en hommage à Hubert Germain, dernier compagnon de la Libération. À Lyon, l’abandon du nom de la place Abbé Pierre, en raison d’accusations posthumes contre le religieux, a déjà marqué une première étape dans ce processus.
Alors que la ville s’engage dans cette réflexion délicate, le maire Grégory Doucet devra équilibrer aspirations mémorielles et réticences locales pour mener à bien cette réécriture symbolique de l’espace public.