Liban – L’hôtel Palmyra, symbole de l’âge d’or du pays, bombardé par Israël. Le témoignage déchirant d’un journaliste libanais

Entrevue 1

Mercredi dernier à Baalbeck au Liban, un bombardement israélien a lourdement endommagé l’hôtel Palmyra, symbole de l’âge d’or du pays. Les vitraux de sa façade, ainsi de la dentelle de bois et de verre, intacts depuis 1874, ont été tous pulvérisés par les bombes. Un véritable drame que le peuple libanais perçoit comme un viol de ses mémoires privées et collectives. Le Palmyra, situé au  cœur de Baalbeck, est en effet considéré comme la « sentinelle du Liban », un lieu mythique qui a traversé le temps et qui, jusque-là, était préservé des bombes.

Très affecté par ce bombardement, le journaliste Gilles Khoury (L’Orient le jour), a rendu un vibrant hommage à l’hôtel Palmyra sur Instagram. Dans un témoignage rempli d’émotion, de tristesse et de nostalgie, le journaliste a partagé son ressenti et ses souvenirs d’un lieu mythique, rappelant sa grandeur passée et le symbole qu’il représente pour tout un pays.

Voici le témoignage de Gilles Khoury suite au bombardement de l’hôtel Palmyra, à Baalbeck au Liban :

« Le viol de nos mémoires privées et collective. 

Dans la nuit de mercredi, en recevant les premières images des dégâts à l’hôtel Palmyra, j’ai eu l’impression qu’on me violait mon endroit préféré au monde, une partie de ma mémoire, de mes souvenirs et, en même temps, qu’on avait blessé la mémoire collective, l’histoire du Liban. 

Le Palmyra est au cœur de Baalbeck, sur la « paroi la plus brûlante du pays » et pourtant, ce petit hôtel fragile comme ses souvenirs a résisté à toutes les tempêtes qui ont secoué la région. Pendant 150 ans. Ensemble avec les ruines de Baalbeck, le Palmyra formait une sorte de boîte à trésors jetée au milieu d’un bout cassé du Liban.

Dans le Palmyra où tout résiste à la vitesse du temps, il y a les fantômes de Nina Simone, de Rudolf Noureev, de Feyrouz, de Joan Baez, d’Ella Fitzgerald et de Herbie Hancock, il y a la trace de la main magique de Cocteau qui a dessiné sur un mur de la chambre 27 où il a résidé à deux reprises un visage trouble et troublant… et qui pourrait être le visage du Liban.

Au Palmyra, il y a la déclaration du Grand Liban qui a été signée ici. Il y a une certaine manière de faire héritée de l’époque du mandat français, il y a des poussières de l’âge d’or des années 1950 et 1960, il y a encore des larmes et du sang de la guerre civile, il y a encore les étincelles des années 2000, quand on pensait que tout était derrière nous. Et qu’on y emmenait des amis de l’étranger avec le cœur juste énorme de fierté que ce lieu nous appartienne, et qu’il reste, malgré tout.

Au Palmyra, il y a surtout Ali et Rima Husseini, les gardiens de ce trésor national qui ont mis tout ce qu’ils ont, leur âme et leur cœur, dans ce lieu pour qu’il dure le plus longtemps possible. Ils incarnent le meilleur du Liban : son humanité… »

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