La célèbre eau gazeuse Perrier, exploitée par le géant Nestlé, pourrait perdre son statut d’eau minérale naturelle, selon un rapport confidentiel de l’Agence Régionale de Santé (ARS) d’Occitanie révélé par Le Monde et Radio France. Le document, remis en août dernier, met en cause la qualité des forages de la source historique de Vergèze, dans le Gard, en raison de contaminations d’origine fécale et de risques virologiques. L’ARS demande à Nestlé de réévaluer l’avenir du site, y compris la possibilité d’un arrêt pur et simple de la production.
Depuis avril 2023, plusieurs forages de la source Perrier ont été suspendus après des inspections ayant révélé des contaminations ponctuelles, attribuées dans un premier temps à des pluies torrentielles. Ces intempéries auraient temporairement compromis la qualité des nappes souterraines. Mais le rapport de l’ARS va plus loin, suggérant une dégradation généralisée de l’environnement hydrologique autour de Vergèze. La préfecture du Gard, qui avait initialement imposé ces suspensions, devra statuer d’ici 2025 sur le renouvellement de l’autorisation d’exploitation de la source.
Ces incidents avaient contraint Nestlé à détruire trois millions de bouteilles déjà mises en rayon, provoquant une onde de choc économique et médiatique. Pour tenter de maintenir ses activités, l’entreprise a intensifié les traitements de l’eau, recourant à la microfiltration, une méthode critiquée par l’ARS. Ce procédé, bien que légal, est accusé de pallier une qualité insuffisante de l’eau brute sans réellement garantir son innocuité. Selon l’agence, ces pratiques s’apparentent à un “non-respect des obligations réglementaires”, et les traitements plus agressifs tels que les filtres UV et le charbon actif — utilisés par Nestlé à Vergèze et sur d’autres sites comme Vittel ou Contrex — sont carrément interdits pour les eaux minérales naturelles.
Nestlé Waters, de son côté, minimise la gravité de la situation. L’entreprise insiste sur le caractère préliminaire du rapport de l’ARS et affirme avoir apporté les ajustements techniques nécessaires pour répondre aux préoccupations sanitaires. “Toutes les eaux commercialisées sous la marque Perrier respectent les normes de sécurité alimentaire”, assure le groupe. Il réfute également toute intention immédiate d’abandonner la production à Vergèze, soulignant que les mesures correctives mises en place permettent de maintenir la qualité de ses produits.
Pour éviter une crise commerciale majeure, Nestlé a par ailleurs diversifié sa gamme en lançant des produits estampillés “Maison Perrier”, qui ne bénéficient pas du label “eau minérale naturelle” mais obéissent à des normes sanitaires moins strictes. Cette initiative permettrait au groupe de contourner les exigences liées à l’exploitation d’une source d’eau minérale, tout en capitalisant sur la notoriété de la marque…