Le « tambour parleur » ivoirien en route vers sa restitution après un siècle d’attente

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Un accord signé le 18 novembre 2024 entre la France et la Côte d’Ivoire marque une étape importante dans le processus de restitution du djidji ayôkwé, surnommé le « tambour parleur ». Confisqué en 1916 par les forces coloniales françaises, cet instrument emblématique de la culture Ébrié, pesant 430 kilos et mesurant 3,50 mètres de long, avait été conservé jusqu’à présent au Musée du quai Branly à Paris.

Un dépôt en attendant une restitution définitive

La ministre française de la Culture, Rachida Dati, et son homologue ivoirienne, Françoise Remarck, ont signé une convention permettant un dépôt à long terme du tambour au Musée des civilisations de Côte d’Ivoire (MCCI) à Abidjan. Cette décision intervient en attendant l’adoption par le Sénat français d’une loi spécifique pour permettre sa restitution définitive, dérogeant au principe d’inaliénabilité des collections publiques, selon les informations rapportées par Franceinfo.

Le tambour rejoindra ainsi les collections du MCCI, qui rouvrira au premier semestre 2025 après des travaux d’extension et de modernisation. Sa scénographie centrale souligne l’importance culturelle et historique de cet objet pour la communauté Ébrié et au-delà.

Un symbole de la coopération culturelle franco-ivoirienne

Le djidji ayôkwé jouait un rôle crucial dans la société Ébrié : il servait à prévenir des dangers, mobiliser pour la guerre, ou encore convoquer les villageois lors de cérémonies. Sa restitution a été réclamée par la Côte d’Ivoire dès 2019, relançant les débats sur la restitution des biens culturels acquis pendant la colonisation.

La ministre ivoirienne Françoise Remarck a salué ce moment comme « historique » et riche en symbolisme. Son homologue française a, quant à elle, souligné que chaque restitution contribuait à la réconciliation culturelle, citant des précédents comme le retour des trésors royaux d’Abomey au Bénin en 2021.

Un cadre légal toujours en débat

Le processus de restitution s’inscrit dans un contexte où la législation française reste restrictive. Une proposition de loi visant spécifiquement le djidji ayôkwé est en cours d’examen par le Sénat. Par ailleurs, une loi-cadre promise par le président Emmanuel Macron pour faciliter les restitutions de biens coloniaux n’a toujours pas vu le jour. Ce tambour devait initialement inaugurer ce nouveau cadre légal, mais les retards ont conduit à privilégier une approche en deux étapes : un dépôt temporaire suivi d’une restitution finale.

Le retour du djidji ayôkwé témoigne de la volonté croissante de redresser les injustices historiques et de renforcer les liens culturels entre la France et l’Afrique, tout en mettant en lumière les défis juridiques et politiques d’un tel engagement.

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