Le smartphone à la main, le regard fixe et le pouce glissant frénétiquement sur l’écran : ce geste est devenu une habitude pour de nombreuses personnes. Pourtant, cet « art du scrolling » peut rapidement virer au « doomscrolling » — une pratique où l’on consomme de façon quasi compulsive des contenus souvent négatifs, sans réaliser l’impact sur notre santé mentale.
Un phénomène préoccupant
Selon une étude de 2022 publiée dans Health Communication et relayée par The Guardian, 16,5 % des 1 100 participants ont présenté des signes de consommation d’information « gravement problématique ». Parmi eux, 74 % ont rapporté des problèmes de santé mentale, et 61 % ont signalé des troubles physiques. Cette tendance inquiète les experts, qui pointent du doigt les effets pernicieux de ce comportement.
Le professeur Craig N. Sawchuk, psychologue à la Mayo Clinic de Rochester, explique que le doomscrolling exacerbe les émotions négatives, telles que la dépression, l’anxiété, la colère et le dégoût. « Le cerveau est naturellement attiré par la menace et la nouveauté, exactement ce que proposent les réseaux sociaux », précise-t-il. Ce processus commence souvent innocemment, dans une volonté de rester informé ou diverti, avant de basculer dans une spirale néfaste.
Les algorithmes des réseaux sociaux sont conçus pour capter notre attention et prolonger notre engagement. Cependant, une exposition prolongée à des contenus anxiogènes peut entraîner une détérioration de l’humeur et du bien-être. « Plus le temps d’exposition augmente, plus l’humeur décline », avertit le Pr Sawchuk. Cette pratique empiète également sur des activités essentielles au bien-être, comme les interactions sociales, les loisirs, l’exercice physique ou même le sommeil.
Comment s’en libérer ?
Le premier pas vers une utilisation saine des réseaux sociaux est la conscience de ses effets. Craig N. Sawchuk propose un exercice simple : avant de scroller, évaluez votre humeur sur une échelle de 0 (négatif) à 10 (positif). Répétez l’exercice après 15 minutes en réglant une alarme. Si vous constatez une baisse de moral, il est temps de changer d’activité : orientez-vous vers des contenus plus légers, fermez l’application ou engagez-vous dans une activité positive, comme appeler un proche ou sortir.
Pour savoir si cette habitude a un impact sur votre bien-être global, posez-vous quelques questions : vous sentez-vous mieux ou pire après une session sur les réseaux sociaux ? Avez-vous ralenti ou arrêté certaines activités positives, comme le sport ou les moments en famille ? N’hésitez pas à demander à vos proches leur avis. L’objectif est de reprendre le contrôle en identifiant et en ajustant vos habitudes pour améliorer votre humeur et votre santé mentale.
En somme, le scrolling incessant n’est pas une fatalité. Avec une prise de conscience et des ajustements simples, il est possible de contrer ses effets négatifs et de retrouver un équilibre entre technologie et bien-être.