Le président du Medef prêt à discuter d’une hausse des impôts des entreprises

Entrevue 1

Dans un contexte budgétaire tendu, alors que le Premier ministre a évoqué une contribution des entreprises pour combler un déficit de 40 milliards d’euros en 2024, Patrick Martin, président du Medef, ne ferme pas la porte à une augmentation des prélèvements. Cependant, il précise que cette contribution ne pourra se faire qu’à deux conditions.

Un effort de l’État exigé

La première condition émise par Patrick Martin est claire : l’État doit réduire ses dépenses de manière significative, bien plus que ce qu’il demande aux entreprises. « Il y a des marges d’économies importantes sans toucher à la qualité du service public », affirme-t-il dans une interview au Parisien. Martin cite la fraude sociale estimée à 6-8 milliards d’euros, la surréglementation qui coûterait 60 milliards, ou encore le régime des travailleurs frontaliers qui génère un manque à gagner de 800 millions.

La deuxième condition est que cette hausse des impôts ne doit pas freiner l’investissement et la création d’emplois, notamment dans un contexte économique jugé fragile. Pour Martin, les entreprises supportent déjà un des niveaux de prélèvements obligatoires les plus élevés au monde, avec 364 milliards d’euros par an. « Nous sommes prêts à discuter, mais à condition que cela n’entrave pas notre dynamique », martèle-t-il.

Un dialogue prudent sur les grandes entreprises

Interrogé sur une possible contribution exceptionnelle des grandes entreprises, Patrick Martin n’écarte pas le sujet mais se montre prudent. Il rappelle que ces dernières sont déjà fortement taxées : impôt sur les sociétés supérieur à la moyenne, versement mobilité de 8 milliards par an, ou encore le 1 % logement.

Quant à la taxation des rachats d’actions, Martin avertit : la moitié de la capitalisation boursière française est détenue par des investisseurs étrangers qui pourraient être dissuadés par une telle mesure. Cependant, avec un taux raisonnable, il est ouvert à la discussion.

Sur le Crédit Impôt Recherche (CIR), souvent critiqué pour ses abus, le président du Medef défend le dispositif : « C’est l’un des plus contrôlés en France », explique-t-il. Il estime qu’il joue un rôle crucial dans l’innovation et la compétitivité, notamment face à des pays comme les États-Unis. Martin met en garde contre une remise en cause trop brutale de cet outil, citant l’exemple de Sanofi qui, malgré un chiffre d’affaires limité en France, y maintient des dépenses d’investissement importantes.

Une politique de l’offre indispensable

Enfin, Patrick Martin exprime son inquiétude quant à un potentiel abandon de la politique de l’offre. Selon lui, le gouvernement est conscient des bons résultats qu’elle a produits. Revenir en arrière serait, selon lui, catastrophique pour l’économie et l’emploi. « Toute décision prise aujourd’hui impactera la compétitivité dans les années à venir », conclut-il. En somme, Patrick Martin se dit prêt à dialoguer avec le gouvernement, à condition que celui-ci fasse également sa part pour réduire les dépenses et préserver l’élan économique du pays.

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