Le Japon féodal au rythme du go : un samouraï face à son destin

Le Japon féodal au rythme du go : un samouraï face à son destin

Avec Le Joueur de go, en salles à partir du 26 mars, le réalisateur japonais Kazuya Shiraishi signe un film de sabre atypique, à la fois épuré, introspectif et d’une beauté visuelle saisissante. Loin des affrontements spectaculaires habituels, ce drame historique plonge dans le Japon du XVIIe siècle à travers le parcours d’un ancien samouraï en disgrâce, Yanagida, interprété par Tsuyoshi Kusanagi. Accusé à tort, il tente de laver son honneur, non par la violence, mais en maniant aussi bien le sabre que les pierres du go, jeu de stratégie érigé ici en véritable art de vivre.

Le récit, centré sur la lente reconquête d’une dignité perdue, prend place dans le quartier populaire d’Edo, où Yanagida survit modestement avec sa fille. Accueilli avec une certaine estime pour sa droiture et sa maîtrise du go, il est néanmoins rattrapé par une nouvelle calomnie. Pour se défendre, il doit quitter la ville, laissant sa fille sous la garde d’une patronne de maison close. Cette quête de justice solitaire, ponctuée de duels aussi rares que poignants, évoque un Japon dominé par l’ordre social, les rituels et le poids des apparences.

Ce qui distingue Le Joueur de go, c’est son esthétique. Kazuya Shiraishi privilégie les plans fixes, les mouvements lents, les scènes sous la pluie et les intérieurs tamisés, pour créer une ambiance contemplative où chaque geste a du sens. Le filmage des parties de go devient un spectacle en soi, métaphore raffinée des tensions souterraines entre les personnages. Comme le souligne France Télévisions, il s’agit presque d’un “film de samouraï psychologique”, où la réflexion prend le pas sur l’action, jusqu’à un affrontement final d’une intensité dramatique rare.

Sans chercher à vulgariser les règles complexes du go, Shiraishi transforme ce jeu millénaire en allégorie du monde : territoire, stratégie, équilibre et sacrifice s’y superposent aux choix moraux du héros. Avec Le Joueur de go, le réalisateur offre une œuvre élégante et profonde, bien plus qu’un hommage au genre — une exploration mélancolique de l’honneur, de la filiation, et des silences qui en disent long sur une société aussi codifiée que cruelle.

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