Le cinéma d’Alain Delon

18 août, 2024 / Entrevue

Alain Delon, décédé ce dimanche 18 août 2024 à l’âge de 88 ans, a marqué à jamais l’histoire du cinéma. Sa carrière exceptionnelle, jalonnée de chefs-d’œuvre, de rôles iconiques, et de collaborations avec les plus grands réalisateurs, en fait l’une des figures les plus emblématiques du septième art. De son entrée fulgurante dans le monde du cinéma à son ultime adieu, Alain Delon incarne à lui seul une époque, un style, une manière d’être à l’écran qui a captivé des générations de spectateurs.

Né le 8 novembre 1935 à Sceaux, dans une famille de la petite bourgeoisie, rien ne prédestinait Alain Delon à devenir l’une des plus grandes stars du cinéma mondial. Après une jeunesse mouvementée et un engagement militaire en Indochine, il revient à Paris, multipliant les petits boulots. Sa beauté ténébreuse et magnétique ne passe pas inaperçue, et il est rapidement repéré par le milieu du cinéma. C’est Yves Allégret qui lui offre son premier rôle dans Quand la femme s’en mêle (1957), ouvrant ainsi la voie à une carrière qui allait bientôt atteindre des sommets.

C’est avec Plein Soleil (1960) de René Clément que Delon obtient sa première consécration. Dans le rôle de Tom Ripley, jeune homme machiavélique prêt à tout pour parvenir à ses fins, il crève l’écran. Ce film, devenu un classique, pose les bases de ce qui sera la carrière de Delon : une incarnation de l’ambiguïté, où la beauté et la noirceur se mêlent avec une intensité rare.

La décennie des années 1960 est marquée par des collaborations avec des cinéastes légendaires. Luchino Visconti, séduit par le charisme de l’acteur, lui confie des rôles marquants dans Rocco et ses frères (1960) et Le Guépard (1963). Dans ce dernier, Delon, en jeune aristocrate sicilien pris entre tradition et modernité, brille aux côtés de Burt Lancaster et Claudia Cardinale. Le Guépard obtient la Palme d’or à Cannes, et Delon devient une icône internationale.

Sa rencontre avec Jean-Pierre Melville en 1967 est un tournant majeur. Ensemble, ils créent Le Samouraï, où Delon incarne Jef Costello, tueur à gages solitaire, un rôle qui deviendra l’un des plus emblématiques de sa carrière. Avec son visage impassible, son regard perçant, et son comportement taciturne, il devient le symbole du film noir à la française, un anti-héros magnétique et fascinant.

Alain Delon n’est pas seulement un acteur; il est également un producteur avisé et un réalisateur talentueux. En 1981, il passe derrière la caméra pour Pour la peau d’un flic, un polar sombre et efficace qui témoigne de sa maîtrise du genre. Il continuera à produire des films tout au long de sa carrière, contribuant ainsi à l’évolution du cinéma français.

La carrière de Delon est aussi marquée par ses collaborations récurrentes avec certains des plus grands noms du cinéma français, comme Jean Gabin, avec qui il partage l’affiche dans Mélodie en sous-sol (1963) et Le Clan des Siciliens (1969). Ces films, qui allient suspense, action et dialogues percutants, sont devenus des références incontournables du cinéma.

Alain Delon a également su s’illustrer dans des registres plus dramatiques, comme en témoigne son rôle bouleversant dans Monsieur Klein (1976) de Joseph Losey. Dans ce film, il incarne un homme pris dans un piège identitaire durant l’Occupation, un rôle complexe et nuancé qui montre l’étendue de son talent.

En 2019, Cannes lui rend hommage en lui décernant une Palme d’honneur pour l’ensemble de sa carrière, célébrant ainsi plus de six décennies d’une présence inoubliable sur les écrans. Ce moment d’émotion intense, où Delon laisse couler des larmes devant un parterre de célébrités, témoigne de la place qu’il occupe dans le cœur du public et du monde du cinéma.

Alain Delon, avec ses 90 films, reste une figure inégalée du cinéma français. Sa beauté, son charisme, et sa capacité à incarner des personnages aussi divers que profonds ont fait de lui une légende vivante. Aujourd’hui, alors qu’il rejoint les grands du cinéma au panthéon des immortels, il laisse derrière lui un héritage artistique immense et indélébile. Le cinéma français, et au-delà, le monde entier, pleure la disparition d’un géant.