L’Assemblée nationale veut restreindre les « polluants éternels » : une avancée en demi-teinte

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L’Assemblée nationale se penche ce jeudi sur la proposition de loi visant à restreindre l’usage des PFAS, ces substances chimiques ultra-résistantes connues sous le nom de « polluants éternels ». Porté par le député écologiste Nicolas Thierry et soutenu par le gouvernement, le texte prévoit d’interdire progressivement certains produits contenant ces substances, dont les textiles et les cosmétiques. Mais sous la pression des industriels, notamment dans le secteur des ustensiles de cuisine, plusieurs restrictions ont été allégées ou supprimées, limitant la portée de cette avancée législative.

À partir du 1er janvier 2026, la fabrication, l’importation et la vente de produits cosmétiques, vêtements et farts de ski contenant des PFAS seront interdites. L’interdiction s’étendra en 2030 aux textiles d’intérieur comme les moquettes et les revêtements de canapés. Toutefois, certaines exemptions sont prévues, notamment pour les équipements de protection destinés aux forces de sécurité et de défense. Initialement incluse dans le texte, l’interdiction des ustensiles de cuisine antiadhésifs a été abandonnée après une intense pression des fabricants, qui ont mis en avant les risques pour l’emploi, notamment au sein du groupe SEB.

Le texte prévoit également un contrôle accru des PFAS dans l’eau potable, avec l’obligation d’intégrer leur détection dans les analyses officielles. Une cartographie nationale annuelle devra être publiée pour informer les consommateurs, alors que des études récentes ont révélé la présence de ces polluants dans près de la moitié des échantillons d’eau du robinet en France. En complément, la proposition de loi instaure un principe de pollueur-payeur en imposant une redevance aux industriels rejetant des PFAS dans l’eau, fixée à 100 euros par 100 grammes émis. Ce dispositif vise à financer la dépollution et à responsabiliser les entreprises.

Alors que plusieurs pays européens appellent à une interdiction plus large de ces substances à l’échelle de l’Union, la France pourrait jouer un rôle moteur dans cette transition. L’Agence européenne des produits chimiques doit rendre ses conclusions d’ici 2026 ou 2027, mais la version finale du texte français, affaiblie par le lobbying industriel, pose la question de sa réelle efficacité. Le gouvernement assume ce compromis, estimant qu’il s’agit d’un premier pas important, tandis que les écologistes et certaines associations dénoncent un manque d’ambition face à l’urgence environnementale et sanitaire.

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