La nouvelle Commission européenne face à l’épreuve des auditions parlementaires

03 novembre, 2024 / Entrevue

Cinq mois après le virage politique à droite au sein de l’Union européenne, l’influence des partis nationalistes et populistes se révélera pleinement la semaine prochaine à Bruxelles. À partir de lundi, les députés européens entament une série d’auditions pour évaluer les nouveaux membres de l’exécutif puissant de l’UE, proposés par les gouvernements nationaux.

Pendant cinq jours, le Parlement européen passera au crible 26 hauts responsables pour déterminer leur aptitude à rejoindre la prochaine Commission européenne, en charge de dossiers cruciaux tels que l’agriculture, le commerce, les affaires économiques, la santé ou la migration.

Une commission au pouvoir croissant

La Commission européenne est l’unique organe de l’UE habilité à rédiger des lois qui, une fois approuvées par le Parlement et le Conseil de l’UE, s’appliquent dans tous les États membres. De la qualité de l’eau à la protection des données, elle façonne des politiques touchant 450 millions d’Européens. La présidente Ursula von der Leyen, qui a constitué cette nouvelle équipe en septembre, vise un équilibre politique, géographique et de genre pour mener le projet européen au cours des cinq prochaines années.

La majorité des candidats appartiennent au Parti populaire européen (PPE), une famille politique conservatrice dont fait partie von der Leyen. Cette situation pourrait faciliter l’approbation de l’équipe, même si le PPE a collaboré avec des groupes de droite dure, comme les Frères d’Italie de Giorgia Meloni, pour obtenir une majorité parlementaire. Par ailleurs, le deuxième plus grand groupe politique, les Socialistes et Démocrates, semble prêt à valider cette nouvelle équipe.

La Commission fonctionne comme un gouvernement, où chaque commissaire gère un portefeuille spécifique. Sous l’autorité de von der Leyen, appuyée par une équipe de plus de 33 000 fonctionnaires européens, elle supervise des négociations commerciales internationales et des questions de concurrence, influençant des géants comme Apple, Google ou Meta. La Commission a également joué un rôle central dans la réponse européenne à la pandémie de COVID-19 et à la crise énergétique causée par la guerre en Ukraine.

De nouveaux visages pour représenter l’Europe

Pour son second mandat, von der Leyen a augmenté le nombre de commissaires issus du PPE à 14, dont dix femmes. Afin de maintenir un équilibre avec les principales puissances européennes, elle s’est entourée de représentants de la France, de l’Italie et de l’Espagne. Elle a notamment nommé l’Italien Raffaele Fitto, allié de Meloni, comme vice-président exécutif pour la politique de cohésion, tandis que l’Espagnole Teresa Ribera supervisera la transition écologique et la concurrence.

Les candidats à la Commission seront interrogés pendant trois heures par des responsables de comités parlementaires liés à leurs portefeuilles respectifs. Ils doivent démontrer leur compétence, leur engagement européen, leur indépendance et leurs capacités de communication. À l’issue de chaque audition, une évaluation confidentielle est réalisée. Pour être confirmés, les candidats doivent obtenir une majorité des deux tiers. En cas d’échec, des questions supplémentaires peuvent être posées ou une nouvelle audition de 90 minutes peut être demandée.

Des candidatures controversées

La composition de l’équipe et l’ordre des auditions, fixé par le PPE et la droite dure, ont suscité des critiques. La candidature de Raffaele Fitto, en particulier, fait débat en raison de ses liens avec Meloni. Le premier candidat à passer, le Maltais Glenn Micallef, est perçu comme politiquement faible par rapport aux anciens ministres et premiers ministres en lice.

La Slovène Marta Kos, envisagée pour le portefeuille de l’élargissement, est critiquée pour son inexpérience et sa position jugée pro-russe. Le Hongrois Oliver Varhelyi, proche d’Orbán, a été affecté à la santé et au bien-être animal. Son cas est délicat : en conflit avec la Commission, Orbán pourrait refuser de nommer un remplaçant en cas de rejet, bloquant ainsi le processus.

Les résultats des votes resteront théoriquement secrets jusqu’au 12 novembre, mais les enjeux politiques sont tels que des fuites sont probables. Toute tentative de veto d’un candidat par un groupe pourrait susciter des représailles contre leurs propres favoris.