« Jeune, pauvre et inconnu, je plaisais quand même aux filles. » Notre interview culte de Jean-Paul Belmondo, 3 ans jour pour jour après sa mort
Il y a trois ans jour pour jour, le 6 septembre 2021, Jean-Paul Belmondo, véritable monument du cinéma français, s’éteignait à l’âge de 88 ans. Afin de commémorer la disparition de cet incroyable artiste, qui a accompagné plusieurs générations de Français, retrouvez ici une interview que nous avions faite de l’acteur, en 1993. Bébel était alors âgé de 60 ans. Il nous parlait de sa vie, de sa carrière, ou encore de son fils Paul. Souvenir…
Entrevue : Vous avez un théâtre à vous et vous allez jouer une pièce de Feydau ailleurs. C’est pour les sous ?
Jean-Paul Belmondo : Pas vraiment. Cela fait peut-être un peu prétentieux, mais côté matériel, je n’ai vraiment besoin de rien. Si je ne joue pas chez moi, c’est parce que j’ai à l’affiche Le Dîner de cons, qu’aucun directeur n’aurait laissé filer. Si je joue Tailleur pour dames au théâtre de Paris, c’est exclusivement pour le plaisir.
Et si vous étiez mille fois plus riche, vous vous offririez quoi ?
En m’offrant le théâtre des Variétés, ma « danseuse », j’ai fait ma folie maximale. Je ne veux rien d’autre. Je n’ai jamais été dans l’extravagance. L’avion, le yacht, l’hélicoptère sur le toit, même si je peux, très peu pour moi.
Pas d’extravagances, mais quelques excès, non ?
Dans quels domaines ?
L’alcool ?
Je me suis offert des pauses de marin assez carabinées, mais je n’ai jamais été accro.
La drogue ?
Jamais touché. Le goût du sport, ça préserve !
Pourquoi, dans votre métier, s’allume-t-on autant la tête ?
Pas plus qu’ailleurs, à mon avis ! Seulement, nous, tout le monde nous regarde. Nos conneries, tout le monde en parle. Ce serait d’ailleurs fabuleux que la drogue ne soit qu’une marotte de saltimbanques. Hélas, elle est partout, chez les trop riches comme dans les HLM…
Natty, alias Nathalie, ex coco-girl ( sa compagne de l’époque, Ndlr. ) est beaucoup plus jeune que vous. Cette différence d’âge vous ennuie ?
Pas du tout. Au contraire, cela me stimule. Sur tous les plans, c’est un stimulus énorme.
Quelle est la principale qualité pour vous plaire ?
La patience ! Pour apprendre à me supporter.
Pourquoi ? À votre avis, quels sont vos pires défauts ?
J’en ai un terrible, d’incroyables sautes d’humeur.
Pour compenser, quelle est votre principale qualité ?
Je crois que je suis quelqu’un d’assez généreux !
Moins riche, vous plaisiez autant ?
La générosité, ce n’est pas seulement le portefeuille. Moi, jeune, pauvre et inconnu, je plaisais quand même aux filles.
Pauvre, c’est peut-être beaucoup dire !
Mes parents ne m’ont pas pourri. Je ne faisais pas pitié, mais je ne faisais pas de jaloux non plus !
Jaloux, vous l’êtes ?
Amoureux, cela veut dire jaloux. Si on abandonne ça, c’est terrible, c’est carrément la démission !
En vieillissant, on devient tolérant, non ?
Vieillir, cela ne veut pas dire dégénérer. Moi, j’avais déjà mal aux genoux à trente ans. N’empêche, je galope encore bien ! ( Jean-Paul Belmondo avait 60 ans au moment de cette interview, Ndlr. )
Votre vitalité, vous l’avez beaucoup mise au service de votre père, dont deux œuvres sont enfin aux Tuileries. Où en est votre combat pour le musée ?
À force de pleurer, on finit par me regarder comme « le bon fils ». Cela m’exaspère. Je me souviens du général de Gaulle s’adressant à mon père dans un cocktail en lui disant : « Monsieur, je vous admire beaucoup », puis se retournant vers moi avec ces mots : « Et pour vous mon garçon, ça commence, non ? » À cette époque, j’avais fait 40 films à succès. N’empêche, le général avait remis les choses à leur place !
Êtes-vous aussi fier de votre fils que de votre père ?
Parfois, je regrette un peu d’avoir acheté à Paul des petites voitures quand il était gosse, mais, au-delà de la peur, j’ai toutes les raisons d’être fier de sa carrière de coureur automobile. Même avec une mauvaise voiture, il a prouvé qu’il était excellent…