Avec Je le jure, Samuel Theis signe un film de procès inhabituel, centré non pas sur l’accusé ou les plaidoiries, mais sur le regard d’un juré anonyme, Fabio, quadragénaire désabusé, interprété avec justesse par Julien Ernwein. Ce troisième long-métrage du réalisateur, attendu en salles le 26 mars 2025, plonge dans les rouages d’une cour d’assises tout en dessinant le portrait d’un homme simple, peu loquace, dont la vie vacille au contact de la justice.
Ouvrier dans un centre de tri, vivant dans une ville de l’Est marquée par la désindustrialisation, Fabio mène une existence en demi-teinte, entre relations bancales, solitude et résignation. Lorsqu’il est convoqué comme juré dans un procès en appel pour homicide involontaire, il entre dans un univers qui lui est étranger. Peu à peu, cette expérience agit comme un révélateur. Face à l’intensité des débats judiciaires, il gagne en lucidité, reprend en main son existence, et s’autorise même un début de rapprochement avec une co-jurée, jouée par Louise Bourgoin.
Tourné dans un style réaliste, caméra à l’épaule, Je le jure se distingue par l’attention portée aux détails du rituel judiciaire et par l’authenticité de ses personnages. Aux côtés d’acteurs confirmés (Marina Foïs, Sophie Guillemin), le film donne la part belle à des comédiens non professionnels, issus de la région de Forbach, comme Marie Masala, ce qui confère à l’ensemble une force documentaire rare.
Après Party Girl (Cannes 2014) et Petite Nature (2022), Samuel Theis continue d’explorer la Lorraine populaire avec pudeur et humanité. Je le jure interroge les effets concrets de la justice sur les individus ordinaires, et offre le portrait touchant d’un homme sans voix qui en trouve enfin une, au fil des audiences. Un film sobre et sensible sur l’émancipation silencieuse d’un citoyen, dans l’un des rares lieux de la République où chacun est appelé à juger.