Interdiction du corse à l’Assemblée de Corse : la Collectivité entend contester devant le Conseil d’État
Le débat linguistique en Corse s’intensifie. La Cour administrative d’appel de Marseille a confirmé, dans un arrêt rendu le 19 novembre 2024, l’interdiction d’utiliser la langue corse lors des débats de l’Assemblée de Corse. Cette décision a suscité une vive réaction de la Collectivité de Corse, qui annonce son intention de former un pourvoi devant le Conseil d’État et, potentiellement, de porter l’affaire devant des juridictions européennes et internationales.
Une décision fondée sur l’article 2 de la Constitution
L’arrêt de la Cour administrative d’appel fait écho au jugement du tribunal administratif de Bastia du 9 mars 2023, qui avait annulé les règlements intérieurs de l’Assemblée de Corse. Selon ces juridictions, les articles permettant l’usage de la langue corse dans les débats étaient contraires à l’article 2 de la Constitution française, lequel stipule que « la langue de la République est le français ».
La Cour a souligné que cette obligation s’applique aux institutions publiques et aux missions de service public. Ainsi, les dispositions permettant aux élus corses de s’exprimer en corse lors des séances de l’Assemblée régionale ou du Conseil exécutif ne respecteraient pas cette exigence constitutionnelle.
Réactions et mobilisation politique
Dans un communiqué, la Collectivité de Corse a vivement contesté cette décision, la jugeant « contraire aux textes européens et internationaux protégeant les droits fondamentaux linguistiques ». Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif, et Marie-Antoinette Maupertuis, présidente de l’Assemblée, ont annoncé vouloir mobiliser tous les recours juridiques possibles pour contester cet arrêt.
Sur le plan politique, les élus autonomistes appellent à une révision constitutionnelle visant à conférer un statut officiel à la langue corse. « Cet arrêt renforce notre détermination à obtenir une reconnaissance pleine et entière de notre langue dans le cadre institutionnel », a déclaré Gilles Simeoni sur X (anciennement Twitter).
Jean-Christophe Angelini, leader du parti de la Nation corse, a qualifié cette décision d’« attaque directe contre notre identité culturelle et notre droit à l’expression démocratique ».
Une question aux résonances nationales
Au-delà de la Corse, cette décision relance le débat sur la place des langues régionales en France. Les défenseurs des langues comme le breton, le basque ou l’occitan y voient une menace pour leur usage dans les institutions publiques.
Le bras de fer juridique qui s’annonce pourrait non seulement définir l’avenir de la langue corse dans l’Assemblée régionale, mais également influencer le cadre légal encadrant les langues dites « régionales » en France.
La Collectivité de Corse espère que ce combat aboutira à une évolution législative et constitutionnelle en faveur de la reconnaissance des langues régionales, un enjeu essentiel pour préserver l’héritage culturel et linguistique de ces territoires.