Innovation et investissements : les clés de Mario Draghi pour une Europe compétitive
Ce lundi 9 septembre 2024, Mario Draghi, ancien président du Conseil italien et ex-président de la BCE, a présenté un rapport majeur sur la compétitivité de l’Union européenne (UE), commandé par Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne. Dans ce document de 400 pages, il dresse un constat alarmant sur l’état de l’économie européenne, soulignant la nécessité d’un changement profond pour combler le fossé avec les États-Unis et la Chine.
Un défi existentiel pour l’Europe
Mario Draghi ne mâche pas ses mots : « Si l’Europe ne parvient pas à devenir plus productive, nous serons contraints de faire des choix difficiles. » Selon lui, la situation est critique et l’Europe risque de ne pas pouvoir maintenir son modèle social, sa responsabilité climatique, ou son indépendance sur la scène internationale. Il appelle à des réformes audacieuses, arguant que l’Europe est à un tournant de son histoire, et qu’une action rapide est nécessaire pour éviter un déclin irréversible.
Un investissement massif de 800 milliards d’euros
L’une des propositions phares du rapport est un plan d’investissement massif de 750 à 800 milliards d’euros pour relancer l’économie européenne. Ce montant équivaut à environ 4,5 % du PIB de l’UE et Draghi estime que l’Europe doit augmenter sa part d’investissement de 22 % à 27 % du PIB pour rattraper son retard technologique et industriel. Parmi les mesures préconisées, il propose que l’UE émette des instruments de dette communs pour financer des projets d’investissement d’envergure, une idée qui pourrait toutefois susciter des débats, notamment en Allemagne.
Le rapport met également en lumière le manque d’innovation en Europe. Contrairement aux États-Unis, qui ont vu émerger des entreprises valorisées à plus de 1 000 milliards d’euros, l’Europe n’a pas créé d’entreprises majeures depuis plusieurs décennies. Pour y remédier, Mario Draghi propose de doubler le budget de la recherche et de l’innovation, en le portant à 200 milliards d’euros sur 7 ans, ainsi que de créer une agence européenne dédiée à l’innovation de rupture, sur le modèle de la DARPA américaine.
Accélérer sur l’intelligence artificielle et les technologies vertes
Conscient des enjeux futurs, Draghi place l’intelligence artificielle (IA) au cœur des priorités économiques de l’UE. Il propose un plan pour intégrer l’IA dans dix secteurs stratégiques, notamment l’automobile, la défense, l’énergie et la santé. Sur le plan de la transition écologique, Draghi prône un équilibre entre compétitivité et écologie, avec un plan commun pour la décarbonation et un renforcement des approvisionnements en gaz naturel liquéfié (GNL) pour mieux négocier à l’échelle collective.
Réformer la gouvernance européenne
Pour que ces réformes puissent voir le jour, Mario Draghi appelle également à une refonte de la gouvernance européenne. Il propose de simplifier les processus bureaucratiques, d’instaurer un cadre de coordination pour la compétitivité et de renforcer le vote à la majorité qualifiée au Conseil de l’UE. En outre, un vice-président de la Commission serait chargé de simplifier la réglementation européenne, afin de libérer les entreprises des contraintes administratives qui freinent leur développement.
Le rapport de Draghi est ambitieux et pose les bases d’un renouveau économique européen. Toutefois, il reste à voir si les dirigeants européens auront le courage de s’engager dans cette voie. Comme l’affirme Mario Draghi, « le statu quo n’est plus une option », et l’Europe doit agir rapidement pour retrouver sa compétitivité sur la scène mondiale.
Ce rapport, avec ses 170 propositions, pourrait bien devenir une feuille de route pour le prochain mandat de la Commission européenne. L’histoire jugera si l’Europe a su saisir cette opportunité pour se réinventer.