Emmanuel Macron a annoncé la création, dès le mois de janvier 2025, d’un haut-commissariat à l’Enfance. Cette décision intervient après les critiques de plusieurs associations qui déploraient l’absence d’un ministère spécifiquement chargé des questions liées à l’enfance dans le gouvernement récemment nommé par François Bayrou.
Un haut-commissariat plutôt qu’un ministère
À l’annonce du nouveau gouvernement Bayrou, la suppression du portefeuille « Famille et Petite Enfance » – auparavant attribué à Agnès Canayer – avait suscité l’inquiétude de nombreuses associations de protection de l’enfance. Celles-ci redoutaient que les questions relatives au bien-être, à la protection et aux droits des enfants ne soient plus clairement prises en compte.
Pour pallier ce manque et répondre aux critiques, Emmanuel Macron a ainsi officialisé la création d’un haut-commissariat à l’Enfance. Ce type d’entité administrative, peu fréquent sous la Ve République, présente la particularité de dépendre directement des services du Premier ministre, tout en étant distinct du gouvernement.
Selon plusieurs sources, dont le cabinet de la ministre Catherine Vautrin (Travail, Santé, Solidarités et Familles), la création de ce haut-commissariat offrirait une stabilité institutionnelle bienvenue, dans un contexte politique marqué par la succession rapide de ministres et par la possibilité de nouvelles censures ou remaniements. L’exemple de François Bayrou, qui est resté haut-commissaire au Plan malgré plusieurs recompositions gouvernementales, illustre l’intérêt de ce statut : un haut-commissariat « administratif » peut perdurer même en cas de changement d’équipe ministérielle.
Les associations de protection de l’enfance estiment qu’une telle stabilité est capitale pour mettre en œuvre des politiques publiques cohérentes et durables. Avec un enfant sur cinq vivant sous le seuil de pauvreté, et 160 000 victimes de violences sexuelles chaque année, les organisations attendent un engagement fort et une coordination interministérielle solide.
Le haut-commissaire à l’Enfance, dont le nom n’a pas encore été dévoilé, aura pour mission de définir et de coordonner un plan d’action transversal, en lien avec les ministères concernés (Familles, Santé, Éducation, Justice, etc.). L’objectif : sortir de l’approche « en silo » et obtenir une vision globale des problématiques enfantines.
Pour autant, plusieurs ONG et acteurs de la société civile s’interrogent sur la portée réelle de ce dispositif. Elles craignent notamment que, sans accès systématique au Conseil des ministres ni réel pouvoir budgétaire, un haut-commissariat ne soit qu’une « mesure cosmétique » dépourvue d’influence politique et de moyens financiers suffisants.
Vers un pilotage renforcé ou un simple affichage ?
Certains militants et représentants d’associations pointent la nécessité de disposer d’un portefeuille dédié – avec un ministre de plein exercice – pour porter et arbitrer les dossiers relatifs à l’enfance. La nomination d’un haut-commissaire, selon eux, risque de réduire la visibilité politique de ce sujet et de complexifier les chaînes de décision.
D’autres y voient au contraire une opportunité : ce haut-commissariat pourrait permettre de pérenniser l’action publique, en évitant les « à-coups » des remaniements successifs. Sa réussite dépendra toutefois de trois facteurs :
- L’étendue de ses prérogatives : le haut-commissariat devra pouvoir élaborer de véritables politiques publiques, en lien étroit avec les différents ministères.
- Les moyens financiers et humains : un budget dédié, couplé à des équipes solides, sera nécessaire pour structurer la politique de l’enfance.
- L’adossement au Premier ministre : un rattachement hiérarchique clair à Matignon faciliterait les arbitrages et donnerait un poids institutionnel plus important à la personne nommée.
Prochaines étapes
Le président de la République a d’ores et déjà promis de préciser le périmètre de ce haut-commissariat lors des premières réunions gouvernementales de l’année, en janvier 2025. Les associations, comme la société civile, attendent de connaître le nom du haut-commissaire et espèrent voir aboutir des politiques concrètes en faveur de la protection de l’enfance, de la lutte contre la précarité et de l’accès aux droits fondamentaux des plus jeunes.
Pour nombre d’acteurs, ce haut-commissariat sera jugé sur sa capacité à véritablement incarner et défendre la cause de l’enfance dans un gouvernement « éclaté » et dans un contexte de forte instabilité politique. L’avenir dira si cette création représente un outil efficace ou un simple affichage.