Le célèbre spiritueux français, le cognac, se retrouve au cœur d’un conflit commercial majeur entre l’Union européenne (UE) et la Chine. À compter de ce vendredi 11 octobre 2024, la Chine, qui représente près d’un quart du marché du cognac, imposera aux importateurs de brandy européen – dont le cognac constitue 95 % – de déposer une caution douanière. Cette mesure est perçue comme une riposte directe à la décision de l’UE d’instaurer des surtaxes supplémentaires sur les véhicules électriques fabriqués en Chine.
Cette escalade entre Bruxelles et Pékin a été déclenchée par des allégations de l’UE sur les subventions accordées aux fabricants chinois de voitures électriques, accusées de fausser la concurrence. La Commission européenne prévoit une augmentation des droits de douane jusqu’à 35 % sur ces véhicules, provoquant la colère de la Chine, qui avait promis des représailles.
Le cognac en première ligne des sanctions chinoises
En janvier, la Chine avait ouvert une enquête sur le brandy européen, prétendant avoir découvert des preuves de pratiques de dumping. Depuis, le ministère chinois du Commerce a intensifié la pression, annonçant que les importateurs devront déposer un dépôt de garantie de 30 à 39 %, qui pourrait être débité rétroactivement si des surtaxes étaient formellement appliquées.
Cette décision inquiète grandement les producteurs français de cognac, dont la Chine représente jusqu’à 60 % du chiffre d’affaires pour certaines maisons. La filière, déjà affectée par une baisse de 22 % des ventes en 2023, craint un impact catastrophique. « Cette mesure pourrait ruiner des milliers d’emplois dans la région, » alerte Raphaël Delpech, directeur du Bureau national interprofessionnel du cognac (BNIC).
Un secteur viticole sous pression
Les négociants et distillateurs charentais sont particulièrement affectés par ces sanctions. Le marché chinois est crucial pour eux, et cette guerre commerciale, qui ne les concerne que de manière indirecte, les place dans une situation périlleuse. En réponse, les professionnels de la filière appellent les autorités françaises et européennes à intervenir d’urgence pour éviter une situation irréparable.
Déjà en septembre, un millier de viticulteurs et négociants avaient manifesté à Cognac pour dénoncer l’inaction de la France et de l’Europe face aux menaces de surtaxes chinoises. « Nous nous sentons otages de cette bataille commerciale, » déplorent-ils.
Le gouvernement français et la Commission européenne n’ont pour l’instant apporté qu’un soutien limité, mais l’enjeu pour l’industrie du cognac reste vital. En plus des 15 000 emplois directs que cette industrie génère en Charente et Charente-Maritime, 70 000 emplois indirects dépendent également de son dynamisme.
Un risque d’escalade commerciale
Si l’UE a lancé un processus visant à soutenir les producteurs européens face à cette décision jugée « injustifiée », le risque d’une guerre commerciale entre Bruxelles et Pékin se fait de plus en plus menaçant. En réponse à l’escalade des tensions, les producteurs de cognac appellent à une désescalade rapide et la suspension de ces mesures avant qu’elles ne portent des conséquences irréversibles.