Ce jeudi 6 juin, les salariés de l’Agence France Presse (AFP) entament une grève de 24 heures à partir de 10 heures. Cette mobilisation vise à protester contre un projet de réforme du statut des journalistes expatriés de l’agence, une mesure perçue par les syndicats comme une menace pour les conditions de travail et les avantages des employés travaillant à l’étranger.
Une mobilisation croissante
Cette nouvelle grève fait suite à une première mobilisation de deux heures qui a eu lieu le lundi 3 juin entre 10 heures et 12 heures. À l’appel de l’intersyndicale de l’AFP (CGT, SNJ, SUD, FO, CFE-CGC), les employés protestent contre des décisions jugées « arbitraires et incohérentes », motivées par des raisons principalement budgétaires.
Le cœur du conflit
Le conflit porte essentiellement sur le statut des journalistes de l’AFP basés hors de France. Actuellement, ces journalistes peuvent bénéficier de deux types de statuts : le statut « siège » et le statut « local ». Le statut « siège », un contrat de droit français, s’accompagne d’avantages tels que la prise en charge des frais de logement et de scolarité des enfants. Les titulaires de ce statut sont également soumis à la mobilité et ne peuvent rester plus de quelques années au même poste. En revanche, le statut « local » est aligné sur le régime social du pays où le journaliste est basé et n’impose pas de mobilité.
Les syndicats dénoncent une réduction drastique du nombre de journalistes bénéficiant du statut « siège ». Depuis 2017, ce nombre est passé d’environ 200 à seulement 140 aujourd’hui. Les organisations syndicales craignent que la direction de l’AFP, sous la houlette de son PDG Fabrice Fries, ne continue à restreindre le recours aux contrats « siège » en introduisant un troisième statut hybride. Ce nouveau statut serait basé sur des contrats locaux, mais avec des cotisations à la retraite française et une obligation de mobilité.
Des réactions partagées
Dans une note interne, la direction de l’AFP a tenté de rassurer ses employés en affirmant comprendre leurs inquiétudes. Elle a souligné la nécessité de réformer le système pour le rendre « plus juste et plus diversifié », tout en répondant aux préoccupations concernant les retraites. La direction a également mis en avant les coûts accrus du dispositif actuel en raison des impôts et des charges sociales à travers le monde, tout en réaffirmant son attachement à un « réseau mondial fort ».
Cependant, ces assurances n’ont pas suffi à apaiser les craintes des syndicats. La récente nomination d’une correspondante à Bruxelles sous statut « local » au lieu de « siège » a exacerbé les tensions, déclenchant le mouvement de protestation.
Un enjeu de taille
Les syndicats insistent sur l’importance de maintenir le nombre actuel de 151 postes sous statut « siège » dans toutes les langues couvertes par l’AFP. Ils estiment que le statut d’expatrié ne doit pas être réservé à la hiérarchie mais doit également inclure les journalistes de terrain.
Cette grève survient à un moment critique, avec de grands événements d’actualité en cours, notamment les cérémonies marquant les 80 ans du Débarquement et une interview télévisée du Président Emmanuel Macron prévue ce jeudi soir. Les perturbations engendrées par cette grève pourraient avoir des répercussions importantes sur la couverture médiatique de ces événements.
Perspectives
Après avoir déposé un préavis de grève, les syndicats envisagent également un recours juridique contre la direction de l’AFP pour « rupture d’égalité » concernant la nomination de correspondants à l’étranger. Une réflexion sur l’évolution du statut d’expatrié est en cours et la direction devrait en présenter les contours en décembre.
En attendant, la grève de ce jeudi 6 juin marque un tournant dans la lutte des journalistes de l’AFP pour la défense de leurs conditions de travail à l’étranger. Les salariés espèrent que leur mobilisation permettra de préserver un statut avantageux et de garantir la pérennité du réseau mondial de l’agence.