EXCLU – François-Xavier Bellamy: « Plus que jamais, aujourd’hui, les Français sont proches des idées de la droite. »
Ce jeudi 23 mai, François-Xavier Bellamy a fait une intervention très remarquée sur France 2 dans l’émission L’Événement. Invité de Caroline Roux, la tête de liste des Républicains pour les élections européennes a poussé un coup de gueule en direct afin de dénoncer la tenue du débat entre Gabriel Attal et Jordan Bardella, qui selon lui constitue une attente à la démocratie, ce débat se basant uniquement sur des intentions de vote et excluant selon lui les autres candidats. Nou avons rencontré François-Xavier Bellamy, qui nous a accordé une interview exclusive, diffusée dans Entrevue. Retrouvez ici l’intégralité de cet entretien…
Entrevue : Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire de la politique ?
François-Xavier Bellamy : La politique n’était pas mon métier. J’ai été professeur de philosophie pendant 10 ans et élu local sans étiquette dans ma ville. Grâce à ça, j’ai eu l’occasion de toucher du doigt la réalité de la crise que traverse notre pays. C’est ce qui m’a conduit à m’engager dans le débat public. D’abord pour alerter sur la situation de l’école, que je crois être l’un des sujets les plus importants pour notre avenir, si ce n’est le sujet le plus important, et ensuite dans la vie politique nationale depuis 2019.
On dit souvent que faire de la politique est devenu un métier qu’en pensez vous ?
Je pense que la politique exige de s’engager avec sérieux, c’est certain. Quand on prend un engagement dans un mandat comme celui de député européen, on ne peut tout simplement pas se comporter comme un amateur. Emmanuel Macron avait dit à ses élus «Soyez fiers d’être des amateurs» ; je trouve que ça pose un problème parce qu’à la fin, c’est la vie des gens qui se décide… Mais cela étant dit, il ne faut pas que la politique devienne une carrière.
Pourquoi avoir choisi le parti les Républicains ?
Je suis de droite et je me suis toujours senti lié à cette vision du monde qui consiste d’abord à vouloir transmettre plutôt qu’à transformer. Et ça, c’est pour moi le vrai clivage qui sépare la gauche de la droite. Je crois que la politique suppose de faire des choix ; ce n’est pas du « en même temps ».
Et la droite que représente le Rassemblement National ?
Le Rassemblement National, qui siège aux abonnés absents au Parlement européen, a gardé une vision de la société très profondément ancrée à gauche. Quand les députés RN à l’Assemblée nationale refusent que les aides sociales soient conditionnées au fait de se former pour revenir vers l’emploi, je constate qu’il y a vraiment une vision de la société qui nous distingue profondément.
Quelle valeur portée par le parti les Républicains vous anime le plus ?
Le sens du travail. Nous voulons défendre la France qui travaille, qui fait vivre le pays et qui ne s’en sort plus. Cette France qui a le sentiment d’être ignorée. La numéro 2 sur ma liste Céline Imart est une jeune agricultrice et les agriculteurs sont vraiment l’image de cette France du travail que l’on veut pouvoir reconstruire.
On considère que vous êtes faites partie des membres les plus à droite au sein du camp LR, êtes-vous d’accord avec cette analyse ?
J’ai toujours été clair, constant et cohérent. Oui je crois que l’on a besoin de frontières pour mettre fin au chaos migratoire, oui je crois que l’on a besoin de sécurité pour retrouver un quotidien plus apaisé, je crois que l’on a besoin de transmettre nos valeurs et si tout cela me vaut d’être catalogué, ça m’est un peu égal.
Alors, est-ce que vous considérez qu’il y a des mouvances plus ou moins compatibles au sein de votre propre parti ?
Il peut y avoir des différences de sensibilité, mais il n’y a pas de contradiction entre nous, on ne pratique pas le « en même temps ». Vous savez, les gens qui sont restés dans ce parti aujourd’hui, sont des gens qui auraient eu 15 occasions de changer de camp et de chercher des voix plus favorables ailleurs, et ils sont restés là, même si c’est difficile parce que l’on croit justement à la ligne que l’on doit défendre ensemble.
Avez-vous un mentor ? Peut-être quelqu’un qui vous a poussé à vous engager en politique ou une figure qui vous inspirait particulièrement…
Je n’en ai pas qu’un, mais vraiment plusieurs. Pendant 5 ans je suis allé partout en France à la rencontre des Français, des maires, des élus locaux, des parlementaires de terrain qui font que le pays tient debout. Je vois aujourd’hui à droite de très belles figures d’engagement qui sont pour moi une grande source d’inspiration. Si je devais en citer une, ce serait aussi le maire avec qui j’ai commencé, François de Mazières, qui est sans étiquette, mais de qui j’ai beaucoup appris.
Vous n’exercez plus le métier d’enseignant de philosophie, mais d’une certaine manière vous restez proche de votre vocation initiale, grâce aux Soirées de la Philo, cela compte pour vous ?
Oui, bien sûr, pour moi c’est un engagement qui compte beaucoup, c’est ma respiration de la semaine. Des milliers et des milliers de personnes ont suivi Les Soirées de la Philo au cours des dernières années et on a fêté dernièrement les 10 ans à l’Olympia.
Votre mandat s’achève, quel a été le combat le plus passionnant que vous ayez mené pendant ces 5 années au sein du Parlement européen ?
Le plus passionnant et le plus important, je crois, c’est le combat que l’on aura mené pour l’énergie. Je me suis beaucoup impliqué pour faire reconnaître le nucléaire qui a été complètement exclu et combattu par les politiques européennes et on a réussi à gagner cette bataille. Si l’on veut rester souverain, il faut que l’on puisse garder la maîtrise de notre production d’énergie.
Quel est le bilan de ces 5 années au parlement ? Qu’a fait l’Europe et qu’avez-vous fait ?
Ça a été un vrai combat de chaque instant parce que l’Europe, malheureusement, s’est engagée dans un mauvais cap. Elle a multiplié les normes, les contraintes, les contrôles, la réglementation. Certains applaudissent à tout ce que fait l’Europe, d’autres au contraire s’opposent juste en dénonçant et en multipliant les slogans, mais nous, on a fait le travail quotidien de combattre et d’agir avec des résultats en effet, pour faire en sorte que les lignes bougent et sur le nucléaire, sur l’agriculture, la protection des frontières, la défense de notre culture aussi ! On aura marqué, je crois, des points importants.
Est-ce que la fonction d’eurodéputé requiert des qualités différentes ou supplémentaires de celles d’un député qui siège en France ?
( Rires ) D’abord, ça se passe dans plein de langues ! Ça paraît anecdotique, mais ce n’est pas rien. Au Parlement européen, on travaille tous les jours avec des élus qui viennent de toute l’Europe, qui ont des langues différentes, mais aussi des cultures politiques, des habitudes et donc il faut s’ouvrir à cette diversité pour réussir à chercher des alliés un peu partout et à faire entendre la voix des Français.
Comment se déroulent les débats au Parlement européen ? Est-ce que cela ressemble à la cacophonie française ?
Ce n’est pas forcément la cacophonie, disons que le Parlement européen est un lieu où l’on doit toujours mener des bras de fer qui sont compliqués et parfois très rudes, mais ça se fait généralement d’une manière moins théâtrale qu’au Parlement français, et les batailles les plus importantes sont celles qui se déroulent de façon discrète.
Comment allez-vous, et comment se passe cette campagne ? On vous retrouve à l’occasion d’un meeting le 23 mars…
Exactement ! Grand meeting à Paris. Je suis enthousiaste, ça va être un très grand moment et je pense que les Français ne sont pas encore complètement rentrés dans cette campagne européenne. Je ne doute pas, que quand le moment du choix viendra, ils verront bien qu’il n’y a qu’une seule force politique qui a fait le travail de les défendre au Parlement européen, et pour moi c’est ça le message qu’il est important de partager : « Allez regarder qui a fait quoi, allez regarder le bilan de chacun ». Encore une fois, vous avez des gens qui sont très forts pour communiquer et faire des grandes déclarations, mais ce qui compte d’abord c’est de regarder la réalité.
Quelles sont les grandes lignes de votre programme ?
Pour nous, il y a un sujet majeur qui est « Est-ce que la France va retrouver les moyens de maîtriser son destin ? ». Aujourd’hui, je pense que les Français ont l’impression de subir ce qui leur arrive, de subir la fragilité des services publics, la crise de l’école, de l’hôpital, de subir l’insécurité, de subir une immigration qui n’est pas régulée, de subir la crise climatique. Tout ce qui nous arrive ne vient pas de nulle part. C’est la conséquence des choix politiques qui ont été faits dans ce pays depuis 2012 finalement, depuis que la gauche est au pouvoir et elle l’est sans discontinuer en réalité, depuis ce moment-là.
Mais quel est le premier combat à mener ?
C’est le combat pour sortir du décrochage économique. La spirale de la dette, c’est l’appauvrissement de la France. Pour ça, il faut libérer les Français des charges, de la fiscalité écrasante qui les asphyxies et du poids des impôts. Il faut aussi les libérer des contraintes, des normes, des contrôles qui sont plus exigeants en France que partout en Europe !
Vous êtes particulièrement sensible à la cause agricole. Est-ce que la Commission européenne est l’unique responsable de la situation catastrophique qu’expriment les agriculteurs ?
Elle n’est pas l’unique responsable, elle a trouvé des gens pour la soutenir au Parlement européen. J’ai alerté sur la dérive de la Commission, mais au Parlement, on a vu se construire une alliance qui allait de l’extrême-gauche aux députés macronistes, et qui a fait passer les textes qui organisaient la décroissance de l’agriculture. C’est de cette logique là qu’il faut sortir. Et moi, je veux dire à ceux qui nous liront que ça s’est souvent joué, sur ces questions-là, à quelques voix près au Parlement européen. Et donc le résultat des élections européennes va être déterminant et votre voix, elle va compter.
Est-ce que la grande époque du parti les Républicains anciennement l’UMP est derrière lui, ou un nouveau rayonnement de cette famille politique est à venir ?
Je pense que plus que jamais, aujourd’hui, les Français sont proches des idées de la droite. Ils veulent plus de sécurité, plus d’autorité de l’Etat, plus de liberté dans la vie quotidienne et ce sont les valeurs que la droite a toujours défendues. Je suis certain que quand on parviendra à sortir des illusions du « en même temps » et de la confusion générale, on retrouvera la réalité d’un débat démocratique et des aspirations que les Français veulent voir défendues. On leur a dit que ça pouvait être une bonne idée de voter pour quelqu’un qui venait de la gauche tout en faisant des choses qui plaisaient à la droite, à la fin, on n’a jamais eu autant d’insécurité, de dettes, d’immigration et notre État n’a jamais été aussi faible. Je crois qu’il est temps de remettre les choses à l’endroit et de retrouver le sens de ces valeurs de droite que nous continuons à défendre.
Avez-vous craint le déclin du parti, ou cru à cette éventualité ?
Évidemment. C’est un combat pour nous. Si l’on était opportuniste et que l’on cherchait un plan de carrière, on irait sans doute ailleurs, mais je suis convaincu que ce dont la France a besoin, c’est que la droite se reconstruise.
Dans les couloirs du parti, des noms circulent pour 2027 ?
Pour l’instant ce qui compte pour nous, c’est 2024. Je suis convaincu que cette élection va être décisive, pas seulement pour l’avenir de l’Europe, mais aussi pour l’avenir de la vie politique française.
Rachida Dati, vous la connaissez bien pour avoir été l’un de ses proches collaborateurs. Est-elle toujours membre du parti les Républicains ?
Non. Elle n’a pas réadhéré. Elle n’a pas renouvelé son adhésion donc elle n’est plus membre des Républicains ! Chacun fait ses choix. Nous, on est dans l’opposition et ceux qui choisissent de rentrer dans le gouvernement, évidemment, ils quittent notre famille politique c’est tout à fait logique.
Vos craintes se portent-elles plus sur la montée de l’extrême droite ou la popularité indiscutable de l’extrême gauche ?
Moi, je vois que tout le monde combat avec vigueur l’extrême droite, mais en réalité, je suis terrifié de voir que, dans une relative indifférence, la dérive de l’extrême gauche menace aujourd’hui ce que nous avons de plus essentiel. Quand j’entends que la France Insoumise recrute une colistière pour être élue au Parlement européen, qui déclare que les actions du Hamas sont légitimes et quand je vois que l’extrême gauche justifie qu’on puisse interdire à un étudiant d’entrer dans un amphithéâtre parce qu’il est juif, je constate que l’antisémitisme est devenu un carburant électoral pour la France insoumise. C’est quand même d’une gravité absolue.
Si vous deviez garder des combats menés par l’un ou l’autre de ces extrêmes, peut-être qu’un seul combat ou une idée, ce serait lequel le plus important pour vous?
Le point important pour moi, ce ne sont pas seulement les idées, et d’ailleurs, si vous les écoutez il y a plein de choses qui ressemblent à ce que l’on dit. Mais la politique ce n’est pas dire, c’est faire. Et de ce point de vue là on a deux manières complètement différentes d’aborder la politique. Vous savez, le Rassemblement National a gagné les élections européennes en 2019. Ils ont gagné de très loin et ils ont eu le plus grand nombre de députés au Parlement européen. Qu’est-ce qu’ils en ont fait ? Avec quoi est-ce qu’ils reviennent aujourd’hui devant les Français ? Après 5 ans de mandat, ils n’auront pas déplacé une virgule dans un seul texte européen. La politique, je le répète, c’est sérieux, c’est pas juste de la communication et des punchlines sur les plateaux. C’est la vie des gens. C’est notre vie à tous.
Et le Parti socialiste dans tout ça ? Qui a toujours été le concurrent principal de la droite républicaine… C’est la fin pour eux ?
Non, j’espère qu’une gauche raisonnable va aussi d’une certaine manière se reconstruire pour empêcher cette dérive vers l’extrême gauche. Je suis en désaccord absolu avec le Parti Socialiste, mais je pense qu’il faut accepter les désaccords en politique pour créer le débat démocratique.
Dans votre emploi du temps chargé, avez-vous l’occasion de vous offrir des loisirs, peut-être un petit peu de sport pour se ressourcer et garder le cap… ?
Malheureusement, je n’ai pas tellement le temps de faire du sport en ce moment, mais ma grande respiration, c’est d’aller naviguer. Vous me parliez de garder le cap et effectivement partir en mer pour moi, c’est une joie toute simple, très abordable et surtout une vraie respiration qui permet de couper avec le quotidien politique.
Interview réalisée par Marie Giancani