États généraux de l’information : une urgence démocratique pour sauvegarder le droit à l’information

12 septembre, 2024 / Entrevue

Les États généraux de l’information, lancés en octobre 2023 à l’initiative d’Emmanuel Macron, ont présenté leurs conclusions ce jeudi 12 septembre 2024. Après neuf mois de consultations et de débats, le rapport de 352 pages met en lumière une « urgence démocratique » pour préserver le droit à l’information en France. Le document tire la sonnette d’alarme face à une situation critique marquée par la désinformation, la polarisation croissante et la concentration excessive des médias.

Le rapport souligne que l’information, décrite comme un « récit du réel indépendant et vérifié », se trouve aujourd’hui marginalisée, tandis que les journalistes sont de plus en plus précarisés. L’espace public, quant à lui, est devenu le terrain de forces diverses qui œuvrent à décrédibiliser l’information à travers l’usage des réseaux sociaux, où la mésinformation prospère grâce à l’accélération des algorithmes. L’intelligence artificielle est également pointée du doigt, à la fois pour ses promesses et les risques qu’elle représente pour la production et la diffusion de l’information.

Pour répondre à cette situation, les États généraux de l’information formulent 15 recommandations. Parmi celles-ci, l’éducation aux médias et à l’esprit critique dans les écoles est jugée essentielle pour former de futurs citoyens capables de discerner le vrai du faux. La création de webradios dans les collèges fait partie des initiatives proposées. Des actions de sensibilisation sont également envisagées pour les décideurs publics, les journalistes et les fonctionnaires, afin de prévenir les manipulations de l’information.

Le rapport plaide également pour une amélioration de la gouvernance des médias, notamment en généralisant les chartes déontologiques afin de restaurer la confiance avec les citoyens. Des mesures sont suggérées pour garantir l’indépendance des rédactions, telles que l’obligation pour les actionnaires de consulter les journalistes avant de nommer un nouveau directeur. Cette proposition fait écho aux événements de l’été 2023, lorsque la nomination de Geoffroy Lejeune à la tête du Journal du Dimanche avait relancé le débat sur l’ingérence des actionnaires dans les rédactions.

Le document met aussi l’accent sur la nécessité de revoir les règles anti-concentration des médias. La diversité des voix et des opinions est essentielle au bon fonctionnement de la démocratie, et une concentration excessive nuit à ce pluralisme. Le rapport souligne l’importance de protéger le secret des sources journalistiques et de légiférer contre les « procédures bâillons » qui cherchent à intimider les rédactions.

En ce qui concerne l’audiovisuel public, les États généraux soulignent la nécessité de garantir un financement stable et pérenne. La suppression de la redevance en 2022 a laissé un vide qu’il est urgent de combler. Le rapport propose un mécanisme de financement reposant sur un prélèvement sur recettes, afin de protéger l’audiovisuel public des aléas politiques.

Sur le plan européen, le rapport plaide pour une reconnaissance européenne du droit à l’information et appelle à renforcer la régulation des algorithmes pour garantir un véritable pluralisme. La lutte contre la désinformation et le cyberharcèlement à l’échelle européenne est un autre enjeu majeur, notamment à travers un second volet du Règlement sur les services numériques (DSA).

Enfin, le rapport espère voir ses propositions transformées en actions concrètes, malgré le contexte politique complexe. Le nouveau Premier ministre, Michel Barnier, aura désormais la responsabilité de mettre ces questions au cœur des priorités gouvernementales, dans un environnement où l’urgence démocratique de sauvegarder l’information ne peut plus être ignorée.