Escale houleuse à Bastia : SOS Méditerranée face à la fronde des nationalistes

Entrevue 1

L’annonce de la venue de l’ONG SOS Méditerranée en Corse a provoqué une onde de choc sur l’île. L’organisation, connue pour ses opérations de sauvetage en Méditerranée, avait prévu de faire escale à Bastia les 22 et 23 septembre 2024 pour lancer un réseau de bénévoles. Cependant, l’extrême droite insulaire, ainsi que des mouvements nationalistes, ont vivement réagi, dénonçant cette initiative et évoquant une menace pour la Corse, qu’ils refusent de voir devenir une « nouvelle Lampedusa ».

Réactions politiques et annulation d’événements

Le mouvement zemmouriste Reconquête, via sa déléguée départementale Marie-Pierre Cesari, a rapidement exprimé son opposition sur les réseaux sociaux, affirmant que « les Corses sont opposés à l’immigration massive ». Des figures nationalistes, comme Nicolas Battini, leader de Mossa Palatina, ont également pris position, déclarant : « La Corse ne sera jamais Lampedusa. »

Les réactions ne se sont pas limitées à l’extrême droite. L’Unione di a Ghjuventù in lotta, regroupant des mouvements de jeunes nationalistes, a publié un communiqué dans le même sens, affirmant que l’île n’a « pas vocation à devenir une porte d’entrée du trafic d’êtres humains ».

Ces protestations ont poussé la direction du Parc Galea, qui devait accueillir une intervention de Sophie Beau, cofondatrice de SOS Méditerranée, à déprogrammer l’événement prévu le 22 septembre. Le parc a justifié sa décision en évoquant un climat d’échange « peu serein » incompatible avec l’esprit familial du lieu.

Soutien mitigé et ajustement du programme

SOS Méditerranée a tenu à clarifier sa mission et à répondre aux accusations, précisant que la création d’une antenne bénévole ne signifiait pas l’ouverture d’un bureau physique, mais plutôt l’organisation d’actions de sensibilisation. L’ONG a réitéré son engagement à « sauver des vies en Méditerranée », conformément au droit maritime international.

Gilles Simeoni, président autonomiste de la collectivité de Corse, a exprimé son soutien à l’ONG, rappelant sur X (anciennement Twitter) que « porter secours à un être humain en détresse est un geste élémentaire d’humanité ». Il a dénoncé ceux qui « attisent les peurs » pour semer la haine.

Malgré l’annulation de la conférence au Parc Galea, SOS Méditerranée a maintenu d’autres événements, dont la projection du documentaire Mothership, réalisé à bord de l’Ocean Viking, au cinéma Le Régent à Bastia le 23 septembre.

Ce n’est pas la première fois que SOS Méditerranée suscite des réactions en Corse. En novembre 2022, l’Ocean Viking avait été temporairement stationné au large de l’île avec 234 migrants à bord, certains dans un état de santé critique. À l’époque, Gilles Simeoni s’était dit prêt à accueillir le navire, un geste qui avait également divisé l’opinion publique.

Alors que l’ONG tente d’implanter un réseau de bénévoles en Corse, les débats autour de la gestion des flux migratoires et de l’humanitarisme continuent de polariser l’île, soulignant une fracture entre solidarité et rejet de l’immigration.

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