Erdogan renforce la tension avec la France : interdiction d’inscription dans les écoles françaises en Turquie

15 août, 2024 / Entrevue

La tension entre la Turquie et la France a franchi un nouveau seuil avec l’annonce par le gouvernement turc de l’interdiction d’inscrire de nouveaux élèves turcs dans les écoles françaises situées à Istanbul et Ankara. Cette décision, qui prendra effet à partir du 1er janvier 2024 pour l’année scolaire 2024-2025, est la réponse d’Ankara à la réticence de Paris à autoriser l’ouverture d’écoles turques en France.

Le ministère turc de l’Éducation a clairement stipulé que les établissements français concernés, le lycée Pierre-Loti à Istanbul et le lycée Charles-de-Gaulle à Ankara, ne pourront plus accueillir de nouveaux élèves turcs jusqu’à ce qu’un accord international garantissant un statut juridique soit conclu. Cette mesure affectera significativement les deux écoles, qui comptent parmi leurs élèves une majorité de ressortissants turcs.

Contexte et réclamations

Le différend a émergé au grand jour le 12 juillet, lorsque la Turquie a exprimé son mécontentement face à ce qu’elle considère comme l’arrogance française dans la gestion des écoles françaises en Turquie. Le ministre turc de l’Éducation, Yusuf Tekin, a accusé la France de ne pas respecter les conditions imposées par Ankara pour l’exploitation de ces établissements. Selon Tekin, la France doit agir selon les exigences turques si elle souhaite maintenir ses écoles en Turquie.

Les autorités turques revendiquent la réciprocité : elles demandent l’ouverture d’écoles turques en France, similaire aux établissements français en Turquie. Ankara insiste également sur la nécessité pour les écoles françaises de respecter les normes turques, y compris en matière d’enseignement de la langue et de l’histoire turques, un point de friction majeur étant l’enseignement du génocide arménien, un sujet sensible pour la Turquie.

Répercussions et contrôles

Le ministère turc a précisé que jusqu’à l’obtention d’un statut légal pour ces écoles, l’enseignement de matières turques devra être assuré exclusivement par des enseignants turcs nommés par le ministère, et les programmes seront soumis à une inspection rigoureuse par les autorités turques.

La France, qui gère ces établissements sous le statut d’écoles à but non lucratif, se trouve désormais dans une situation complexe. Les écoles françaises en Turquie ont été initialement créées pour les enfants des diplomates français mais accueillent aujourd’hui une majorité d’élèves turcs. En conséquence, le gouvernement turc a jugé que leur statut devait être réévalué.

Perspectives d’avenir

Malgré les tensions, l’ambassade de France à Ankara a indiqué que les négociations pour trouver un accord durable reprendraient à la rentrée. Cependant, la situation reste tendue, et la France se trouve confrontée à des défis importants pour concilier ses objectifs éducatifs avec les exigences turques.

Cette crise s’inscrit dans un contexte plus large de réformes éducatives en Turquie sous la présidence de Recep Tayyip Erdogan, marquées par une tendance à islamiser l’éducation, ce qui pourrait également influencer les négociations en cours.

En attendant, la France et la Turquie devront naviguer avec prudence pour éviter une détérioration supplémentaire des relations diplomatiques et trouver une solution équilibrée qui satisfait les intérêts des deux parties.