Les Croates se rendent aux urnes ce dimanche pour élire leur président pour un mandat de cinq ans. Bien que le président sortant, Zoran Milanovic, soit en tête des sondages avec 37 % des intentions de vote, il semble peu probable qu’il l’emporte dès le premier tour, ce qui ouvrirait la voie à un second tour prévu le 12 janvier.
Ancien Premier ministre social-démocrate (SDP) et élu président en 2020, M. Milanovic affronte sept autres candidats. Son principal rival, Dragan Primorac, ancien ministre et figure soutenue par les conservateurs du HDZ (parti au pouvoir), recueille 20 % des intentions de vote.
Une campagne polarisante dans un contexte difficile
Les enjeux de cette élection se jouent dans un contexte marqué par l’inflation, une corruption omniprésente et une pénurie de main-d’œuvre. Pour beaucoup d’électeurs, les espoirs de changement restent faibles, comme en témoigne Davor Kallay, un chômeur de 60 ans : « J’espère une baisse de l’inflation et une hausse des salaires, mais je n’attends pas de miracles. »
La fonction présidentielle en Croatie, bien que largement symbolique, confère un rôle clé en tant que chef des armées et représentant du pays sur la scène internationale. Les électeurs voient également le président comme un contrepoids essentiel à l’influence du HDZ. Nenad Horvat, électeur de Zagreb, résume cet enjeu : « Milanovic est la dernière barrière pour empêcher que tous les leviers du pouvoir tombent entre les mains du HDZ. »
La campagne a été marquée par des attaques personnelles entre les deux principaux candidats. Zoran Milanovic a qualifié son adversaire de « faux comme un billet de 13 euros et ennuyeux comme un match amical ». Dragan Primorac, en retour, l’a décrit comme un président « pour qui rien n’est sacré » et l’a accusé de paresse : « Il se lève à 11 h 30. »
M. Milanovic, réputé pour son verbe acerbe, a vu son image évoluer au cours de son mandat. Celui qui promettait une Croatie « moderne et ouverte » en 2020 adopte désormais une rhétorique populiste et offensive. Il s’est notamment distingué par sa position ambivalente sur la guerre en Ukraine, dénonçant l’agression russe tout en critiquant l’aide militaire occidentale à Kiev.
Cette posture lui a valu d’être accusé de « détruire la crédibilité de la Croatie auprès de l’Otan et de l’UE » par le Premier ministre Andrej Plenkovic. Pourtant, la Croatie a fourni une aide militaire de 300 millions d’euros à l’Ukraine.
De son côté, M. Primorac, médecin et ancien ministre des Sciences et de l’Éducation, a misé sur une campagne axée sur l’unité et les valeurs familiales. Il accuse son rival de « déshonorer la Croatie » et espère incarner une alternative pour les électeurs conservateurs.
Une élection à fort enjeu politique
Au-delà du duel entre Milanovic et Primorac, cette élection est perçue comme un nouvel épisode du bras de fer entre le président et le Premier ministre Plenkovic. « Tout tourne autour de leur conflit personnel. Le reste est secondaire », estime l’analyste politique Zarko Puhovski.
Les premiers résultats des sondages à la sortie des urnes seront dévoilés ce soir à 19 h (18 h GMT), avant les résultats officiels attendus dans la soirée. Si aucun candidat n’atteint la majorité absolue, comme le prévoient les sondages, Croates et analystes se tourneront vers le second tour pour connaître l’issue de ce scrutin décisif.