Crise des finances locales : le cri d’alarme de David Lisnard

Entrevue 1

À l’approche du 106e Congrès des maires de France, qui s’ouvrira le 19 novembre à Paris, David Lisnard, président de l’Association des maires de France (AMF) et maire de Cannes, s’est confié à La Tribune Dimanche. Dans cet entretien, il partage son analyse sur la situation financière des collectivités locales et appelle à une réforme profonde de la gestion des services publics, axée sur la rigueur, la responsabilité et une répartition plus juste des rôles entre l’État et les communes.

Une situation financière critique pour les communes

Pour la troisième année consécutive, Emmanuel Macron ne clôturera pas le Congrès des maires, laissant cette tâche au Premier ministre Michel Barnier. Les élus locaux, eux, affichent leur mécontentement, notamment via des banderoles dénonçant les politiques publiques. Pour David Lisnard, cette mobilisation, bien qu’inhabituelle, illustre une colère légitime face à des prélèvements qui grèvent les budgets locaux.

« Les prélèvements annoncés dans le projet de loi de finances représentent en moyenne 20 % des capacités d’autofinancement des mairies. Cela entraîne des reports de projets structurants, comme c’est le cas à Cannes avec le réaménagement de la Croisette », explique-t-il. Lisnard rappelle qu’il s’est engagé à baisser la dette de sa ville tout en maintenant une fiscalité locale parmi les plus basses de France.

La suppression de la taxe d’habitation : une erreur coûteuse

Pour David Lisnard, la suppression de la taxe d’habitation, décidée dès la campagne présidentielle de 2017, n’a fait qu’aggraver la situation. « Sans réforme globale de la fiscalité, cette mesure impliquait forcément une augmentation des prélèvements ailleurs ou un accroissement de la dette de l’État », alerte-t-il.

Les collectivités, selon lui, sont bien gérées dans l’ensemble. « Leur dette représente seulement 8,9 % de la richesse nationale, contre une dette publique multipliée par trois en trente ans. Pourtant, les charges transférées par l’État ne cessent d’augmenter. »

Lisnard déplore que le centralisme étatique pénalise les collectivités, entravant leur efficacité tout en augmentant les dépenses publiques globales.

Changer de culture : la clé de la performance

Pour sortir de l’impasse budgétaire, David Lisnard appelle à un changement profond de culture dans la gestion des services publics. « Le coût des normes supplémentaires imposées aux collectivités s’élève à 4,1 milliards d’euros sur deux ans. Il faut se demander pour chaque dépense : peut-on faire moins cher ? Peut-on confier cela au privé ? Est-ce nécessaire ? »

Il plaide également pour une responsabilisation des citoyens. « Le lien entre l’impôt et la dépense doit être clair. Les habitants ne doivent plus se comporter en simples consommateurs de services publics mais en coresponsables. »

Lisnard s’oppose à un retour de la taxe d’habitation sous sa forme initiale ou à la création d’un impôt local sur le revenu, estimant que cela pénaliserait les classes moyennes et les propriétaires.

Une vision pour une réforme globale

Avec son parti Nouvelle Énergie, David Lisnard propose une clarification des missions entre les administrations et une réduction drastique des charges publiques inutiles. « Il faut supprimer les subventions, crédits d’impôt et exonérations de charges aux entreprises, qui ne font qu’alourdir les prélèvements. En échange, diminuons massivement les charges et simplifions les procédures. »

Pour lui, il n’y a pas de fatalité au délitement des services publics. « Si nous avons le courage de désintoxiquer la classe politique et la société de l’intervention publique excessive, nous pourrons retrouver un service public performant et durable. »

En somme, David Lisnard prône une gestion fondée sur la rigueur, la responsabilité et l’efficacité. Un discours qui résonnera sans doute fortement lors du Congrès des maires, où les élus locaux attendent des réponses concrètes à leurs inquiétudes.

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