La crise politique s’intensifie au Canada. Chrystia Freeland, vice-Première ministre et ministre des Finances, a annoncé lundi sa démission, marquant un coup dur pour le gouvernement de Justin Trudeau en plein tumulte économique.
Dans une lettre adressée au Premier ministre et diffusée sur X, Chrystia Freeland a justifié son départ par des « désaccords » avec Justin Trudeau concernant la stratégie à adopter face à l’escalade des tensions commerciales avec les États-Unis. « Nous nous trouvions en désaccord sur la meilleure voie à suivre pour le Canada », a-t-elle écrit, soulignant la gravité des « grands défis » auxquels le pays est confronté.
Cette décision intervient alors que Donald Trump, récemment élu président des États-Unis, menace d’imposer des droits de douane de 25 % à ses voisins, une mesure qui a créé un véritable séisme au Canada, dont 75 % des exportations dépendent du marché américain.
Une figure incontournable quitte le navire
Chrystia Freeland, 56 ans, était une figure centrale du gouvernement Trudeau depuis 2015. Ancienne journaliste polyglotte, elle avait successivement occupé les postes de ministre du Commerce international, des Affaires étrangères et des Finances, devenant la première femme à occuper cette dernière fonction. Elle était aussi souvent citée comme une successeure potentielle de Justin Trudeau à la tête du Parti libéral.
Pour lui succéder, Dominic LeBlanc, ministre chevronné et proche de Justin Trudeau, a immédiatement pris ses fonctions. Il devra notamment mener les négociations avec l’administration Trump. Dans un contexte économique tendu, son entrée en poste coïncide avec l’annonce d’un déficit budgétaire de 62 milliards de dollars canadiens, soit 15 milliards d’euros au-dessus des prévisions.
Cette démission a provoqué une nouvelle onde de choc dans le paysage politique canadien. Elle intervient alors qu’un autre ministre, Sean Fraser (Logement), a quitté le gouvernement le même jour pour des « raisons familiales ». Le chef de l’opposition conservatrice, Pierre Poilievre, n’a pas tardé à réagir, dénonçant une « perte de contrôle » du Premier ministre. « Justin Trudeau s’accroche au pouvoir, mais cela ne peut plus durer », a-t-il déclaré en conférence de presse. De son côté, Donald Trump n’a pas manqué d’enfoncer le clou. Sur son réseau Truth Social, le président élu américain a qualifié Chrystia Freeland de « toxique », estimant que son comportement était « nuisible à la conclusion de bons accords pour les Canadiens ».
Une « panique » politique
L’affaiblissement du gouvernement Trudeau survient dans un climat de panique croissante. Fin novembre, le Premier ministre avait effectué un déplacement express en Floride pour rencontrer Donald Trump. Depuis, il multiplie les consultations avec les chefs des provinces, dont Doug Ford, à la tête de l’Ontario, qui a menacé de couper les exportations d’électricité vers les États-Unis en réponse aux mesures douanières.
Les analystes politiques estiment que la position de Justin Trudeau est de plus en plus fragilisée. Lori Turnbull, professeure à l’Université Dalhousie, juge que cette démission place le gouvernement dans un état de « choc et panique ». « Il est beaucoup plus difficile pour Trudeau de rester en place. Il perd une certaine légitimité », analyse-t-elle.
Alors que les prochaines élections législatives sont prévues au plus tard en octobre 2025, plusieurs experts anticipent des élections anticipées si la situation continue de se dégrader. Pour Justin Trudeau, la bataille pour conserver son leadership semble plus incertaine que jamais.