Budget 2025 : la santé publique en danger selon le patron de l’AP-HP, Nicolas Revel

29 septembre, 2024 / Entrevue

Alors que le Premier ministre Michel Barnier s’apprête à dévoiler les grandes lignes de sa politique budgétaire le 9 octobre 2024, le directeur général de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), Nicolas Revel, tire la sonnette d’alarme. À la tête du plus grand groupe hospitalier français depuis juillet 2022, Revel s’inquiète des économies envisagées dans le secteur de la santé, qu’il juge crucial de préserver dans un contexte de redressement.

Dans une interview accordée à La Tribune ce dimanche, Nicolas Revel souligne l’importance du soutien financier pour les hôpitaux, notamment pour absorber les revalorisations salariales et les effets de l’inflation. Ancien directeur de l’Assurance maladie, il est conscient des contraintes budgétaires mais met en garde contre une « politique du coup de rabot ». Selon lui, des ajustements annuels sur les tarifs hospitaliers risquent d’affaiblir un système déjà fragilisé : « N’oublions pas les leçons du Covid et de la crise hospitalière qui a suivi », prévient-il.

Pour Revel, l’hôpital public reste le « dernier rempart » pour garantir l’accès aux soins. « Ce n’est ni un luxe ni un acquis », déclare-t-il, ajoutant que fragiliser l’hôpital au moment où il commence à se redresser serait une grave erreur. Il pointe également du doigt des facteurs coûteux comme les retards de dépistage, les actes médicaux inutiles, ou encore les arrêts de travail injustifiés. Mieux prévenir et mieux soigner permettrait de générer des économies conséquentes, selon lui.

Nicolas Revel exprime aussi son désaccord face à l’idée de réduire drastiquement l’aide médicale d’État (AME), une proposition défendue par certains membres des Républicains, dont Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur. Pour lui, cela constituerait « un contresens sanitaire et financier », et risquerait de faire peser la facture des soins sur les hôpitaux eux-mêmes.

Un budget 2025 sous tension

En parallèle, Marine Tondelier, secrétaire nationale des Écologistes, a dénoncé sur les réseaux sociaux les coupes budgétaires en préparation pour 2025, notamment les 2 milliards d’euros de moins pour les hôpitaux. Selon elle, des fonctionnaires présents dans certaines réunions auraient fait remonter ces informations. Elle accuse le gouvernement de préparer « en catimini » ces économies, en dépit des promesses électorales.

Le ministère de l’Économie a confirmé avoir envoyé des propositions de plafonds de dépenses à Matignon, sans en préciser les détails. Toutefois, l’objectif global reste de réaliser 25 milliards d’économies, conformément à la trajectoire de réduction du déficit public, qui doit passer sous la barre des 3 % d’ici 2027. Bruno Le Maire, ancien ministre de l’Économie, soutient cette stratégie, expliquant que les ministères doivent être préparés à une transition fluide pour le prochain gouvernement.

Les critiques affluent cependant, notamment de la part de la gauche, qui y voit une attaque directe contre les services publics. Le Nouveau Front Populaire, en particulier, appelle à la nomination de Lucie Castets à Matignon pour porter un contre-projet basé sur la défense des services publics.

Le débat sur le budget 2025 s’annonce donc tendu, avec des enjeux majeurs pour la santé publique, les finances de l’État, et la politique générale du gouvernement en place.