Benjamin Morel, maître de conférences en droit public à l’université de Paris 2, observe une « recomposition » du paysage politique français, tendant vers une nouvelle bipolarisation entre des pôles plus radicaux : la gauche et l’extrême droite. Entre ces deux pôles, le bloc central, actuellement représenté par la majorité relative du président Emmanuel Macron, risque d’être affaibli malgré sa persistance.
Lutte contre les extrêmes
Emmanuel Macron, dont la campagne législative des 30 juin et 7 juillet se concentre sur la lutte contre les « extrêmes », fait face à une concurrence accrue. Marine Tondelier, à la tête des Écologistes, a affirmé que le choix se résumerait à « soit l’extrême droite, soit nous ». Jordan Bardella, président du RN, a désigné le NFP, unissant divers mouvements de gauche, comme son principal adversaire. Bardella voit deux principales formations capables de former un gouvernement : La France insoumise avec ses alliés de gauche, ou une alliance entre Les Républicains et le Rassemblement national.
La vision de Marine Le Pen
Marine Le Pen soutient que le RN est un parti patriote, refusant de se laisser catégoriser comme un parti de droite. Elle insiste sur un « combat entre les nationaux et les internationalo-mondialistes », rejetant le clivage traditionnel droite-gauche. Gabriel Attal, Premier ministre et chef de campagne de la majorité sortante, défend l’idée de trois blocs, avec un bloc central « républicain » qu’il souhaite voir triompher face aux « deux extrêmes ».
Risque pour le centre
Selon Benjamin Morel, la polarisation politique nuit au centre, qui pourrait disparaître dans de nombreuses circonscriptions si la gauche devance le camp macroniste au second tour. Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale, regrette l’échec à engager le pays dans une coopération entre partis, une idée centrale du « dépassement » prôné par Macron en 2017. Jean Pisani-Ferry, ancien conseiller de Macron, critique l’incapacité à créer un consensus autour d’une politique équilibrée, contribuant à renforcer les extrêmes.
Incertitudes post-électorales
Le député sortant Renaissance Gilles Le Gendre met en garde contre le risque de devenir une « minorité de l’effacement ». Anne-Charlène Bezzina, maître de conférences en droit public à l’université de Rouen, souligne que les alliances électorales pourraient différer des alliances parlementaires après les élections, selon la répartition des sièges. Si trois blocs – RN, gauche, et majorité – obtiennent des résultats équivalents, cela pourrait conduire à une majorité très relative et à une instabilité gouvernementale, avec des risques de censure fréquente par les oppositions.
Cette recomposition politique laisse entrevoir une période de grande incertitude pour le paysage politique français, marquée par la montée des extrêmes et la fragilisation du centre.