Alfredo Cristiani et quatre militaires poursuivis pour la massacre de prêtres jésuites en 1989

Entrevue 1

Un tribunal de San Salvador a ordonné la capture de l’ancien président du Salvador, Alfredo Cristiani, ainsi que de quatre anciens militaires, pour leur implication présumée dans la massacre de six prêtres jésuites et de deux collaboratrices en 1989, durant la guerre civile salvadorienne. Cette décision s’inscrit dans le cadre de la réouverture d’un dossier emblématique des violations des droits humains de cette période.

Un massacre pendant la guerre civile

Dans la nuit du 16 novembre 1989, au cœur de la plus grande offensive des guérillas salvadoriennes, un commando d’élite de l’armée, issu du bataillon Atlacatl, a pris d’assaut le campus de l’Université centraméricaine José Simeón Cañas (UCA). Les soldats ont assassiné six prêtres jésuites : Ignacio Ellacuría, Segundo Montes, Ignacio Martín-Baró, Amando López, Juan Ramón Moreno et Joaquín López. Également tuées lors de l’attaque, Elba Ramos, collaboratrice de l’université, et sa fille de 16 ans, Celina Ramos.

À l’époque, Alfredo Cristiani, président de 1989 à 1994, était également commandant en chef des forces armées. L’armée considérait l’UCA comme un « refuge de subversifs », en raison des critiques des jésuites sur les inégalités sociales et les violences gouvernementales.

En mars 2022, un mandat d’arrêt avait déjà été émis contre Cristiani, mais sa localisation reste inconnue. Quatre anciens colonels de l’armée ainsi que Rafael Larios, ancien ministre de la Défense, sont également inculpés dans cette affaire. Ils font face à des accusations de terrorisme, d’assassinat, de fraude procédurale et de dissimulation.

Un dossier rouvert après des décennies

La justice salvadorienne avait initialement enterré l’affaire sous le coup de la loi d’amnistie de 1993, adoptée après les accords de paix mettant fin à la guerre civile (1980-1992). Cependant, cette loi a été annulée en 2016, permettant la réouverture du dossier en 2017. Ce nouveau procès est également soutenu par la communauté jésuite et l’Université centraméricaine, qui demandent justice pour les victimes.

Dans cette affaire, plusieurs officiers ont déjà été condamnés. Guillermo Benavides Moreno, colonel de l’armée, purge une peine de 30 ans au Salvador. Inocente Montano, un autre militaire, a été jugé et condamné en Espagne à 133 ans de prison pour ces crimes.

La guerre civile au Salvador a fait plus de 75 000 morts et 7 000 disparus. Ce procès emblématique rappelle l’importance de la justice pour surmonter les traumatismes collectifs et établir la vérité sur les exactions commises pendant cette période sombre de l’histoire salvadorienne.

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