France : la notation S&P Global attendu en plein tumulte budgétaire

29 novembre, 2024 / Entrevue

L’agence de notation S&P Global Ratings doit dévoiler ce vendredi soir sa nouvelle évaluation de la dette souveraine française, alors que le gouvernement traverse une crise budgétaire et politique sans précédent. Cette annonce intervient dans un contexte où l’exécutif, déjà minoritaire, tente de consolider sa fragile position face à la menace d’une motion de censure.

Un gouvernement sous pression

Pour éviter la chute, le gouvernement a multiplié les compromis sur le budget 2025. Parmi les concessions notables, il a renoncé à augmenter une taxe sur l’électricité au-delà du niveau fixé avant l’instauration du bouclier tarifaire, satisfaisant ainsi les exigences du Rassemblement national (RN). Cependant, cette victoire est jugée insuffisante par Jordan Bardella, président du RN, qui maintient la pression en exigeant des garanties sur des sujets comme le non-déremboursement de certains médicaments.

Cette instabilité politique, marquée par des reculs sur des réformes clés comme les retraites ou les cotisations patronales, pourrait peser dans la décision de S&P. Selon Charles-Henri Colombier, économiste chez Rexecode, « l’instabilité risque de perdurer, ce qui pourrait inciter S&P à revoir la perspective française ».

En mai dernier, S&P avait déjà abaissé la note de la France, passant de « AA » à « AA- », mais avec une perspective stable. Cette fois, les experts anticipent une éventuelle détérioration, que ce soit par un abaissement supplémentaire ou un passage en perspective négative. Norbert Gaillard, économiste indépendant, évoque aussi la possibilité d’un placement sous surveillance négative, signalant une tension accrue susceptible de mener à une dégradation rapide.

Pour autant, une perspective négative aurait un impact limité sur les coûts d’emprunt à court terme. En revanche, une nouvelle baisse de la note pourrait accentuer la fébrilité des investisseurs et augmenter les taux de rendement exigés par les marchés.

Tensions sur les marchés

Déjà malmenée, la position de la France sur les marchés financiers se détériore. Le taux d’emprunt à 10 ans du pays a brièvement dépassé cette semaine celui de la Grèce, un signal inquiétant pour une économie longtemps perçue comme plus robuste. L’écart entre les taux français et allemands (« spread ») a atteint des sommets avant de se stabiliser légèrement après les annonces concernant l’électricité.

Les experts restent prudents. Alexandre Baradez, analyste marchés chez IG France, souligne que si les concessions budgétaires peuvent être perçues positivement à court terme, elles risquent de nuire à l’efficacité des réformes si elles sont jugées excessives ou motivées par des considérations politiques.

Objectif : maîtriser le déficit

Malgré les ajustements au projet initial, le Premier ministre Michel Barnier s’est voulu rassurant. Il a réitéré l’engagement de réduire le déficit public à environ 5 % du PIB en 2025, contre 6,1 % attendus cette année. Mais ces efforts suffiront-ils à convaincre S&P et les investisseurs ? La réponse de l’agence ce soir pourrait sceller l’avenir économique immédiat de la France.

L’incertitude reste totale, et une dégradation de la note pourrait précipiter une situation déjà jugée critique par de nombreux observateurs.