Bruxelles valide les efforts budgétaires de la France, malgré une crise politique

26 novembre, 2024 / Entrevue

La Commission européenne publie ce mardi son évaluation des budgets des États membres de l’Union européenne. Malgré un déficit public record, la France pourrait obtenir le soutien de Bruxelles pour son plan d’assainissement des finances publiques. Cette validation arrive alors que le gouvernement français, confronté à une menace de censure, peine à imposer des mesures impopulaires.

La France, mauvais élève budgétaire de l’Europe

Avec un déficit public prévu à 6,2 % du PIB en 2024, la France se classe parmi les pires élèves de l’Union européenne, juste devant la Roumanie. Ce niveau dépasse largement le seuil des 3 % fixé par les règles européennes. Face à cette situation, le ministre des Finances, Antoine Armand, a annoncé un plan ambitieux visant à réduire les dépenses publiques de 60 milliards d’euros l’année prochaine, combiné à de nouvelles recettes fiscales.

Cependant, les mesures envisagées, comme l’augmentation des taxes sur l’électricité, suscitent une vive opposition. Marine Le Pen, présidente du Rassemblement national, critique leur impact sur le pouvoir d’achat et menace de soutenir une motion de censure en collaboration avec les partis de gauche, ce qui pourrait faire tomber le gouvernement.

La Commission européenne doit publier son avis à 15h00 sur le projet budgétaire 2025 des pays de la zone euro. Selon des sources européennes anonymes, Bruxelles devrait saluer le plan français, jugé conforme à la trajectoire de retour sous les 3 % de déficit d’ici 2029. Paris ambitionne de réduire le déficit à 5 % dès 2025 avant de revenir dans les limites européennes d’ici cinq ans.

Pour Andreas Eisl, expert à l’Institut Jacques-Delors, le gouvernement français a choisi une approche stricte, allant même au-delà des exigences de la Commission. Cependant, la question demeure : ces mesures pourront-elles être mises en œuvre dans un contexte de fragilité politique ? « La situation politique de la France inquiète évidemment Bruxelles », souligne-t-il.

Des sanctions financières possibles pour les pays en déficit excessif

Depuis cet été, la France fait partie des huit États européens en procédure de déficit excessif, aux côtés de la Belgique, de l’Italie, de la Hongrie ou encore de la Pologne. Ces pays doivent adopter des mesures correctrices pour revenir dans les clous sous peine de sanctions. Bien que la Commission ait jusqu’ici évité d’imposer des amendes, ce pourrait être une éventualité pour inciter au respect des règles.

Si Paris ne respecte pas ses engagements, elle risque une sanction annuelle équivalente à 0,1 % de son PIB, soit environ 2,8 milliards d’euros. Ces sanctions, bien que revues à la baisse pour être plus applicables, symbolisent la pression croissante des partenaires européens pour faire respecter les règles budgétaires.

Suspendu entre 2020 et 2023 pour faire face à la pandémie de Covid-19 et aux conséquences de la guerre en Ukraine, le pacte de stabilité a été réactivé début 2024 dans une version plus flexible. Désormais, les trajectoires de retour à l’équilibre budgétaire sont adaptées à chaque État membre et permettent des marges pour l’investissement. La période de correction des déficits peut également être étendue de quatre à sept ans, en échange de réformes structurelles.

Pour autant, certains États européens appellent à une stricte application des nouvelles règles. « Si dès le début on ne sanctionne pas les manquements, personne ne les respectera », avertit Andreas Eisl. Dans ce contexte, l’appui de Bruxelles au gouvernement français pourrait s’avérer crucial. Mais avec un exécutif fragilisé, la mise en œuvre de ces réformes reste une bataille incertaine.